L'identité du label qui édite un album est rarement anodin. Ainsi lorsque l'Allemand Iron Bonehead Productions associe son nom à une offrande, on peut parier que celle-ci sera authentiquement caverneuse, aimant se repaitre dans un humus evil et dégraissée de tout artifice à la mode. Dont acte. Dominion Of The Wicked s'emboite ainsi parfaitement dans un catalogue où se côtoient aussi bien Nocternity que Bloodsoaked Necrovoid, Temple Nightside que Pa Vesh En, autant de bestioles qui ne peuvent proliférer que dans les caveaux les plus humides et infâmes de l'underground. Précédé par un EP (A Full Negation Of Existence) et deux méfaits longue durée (Beneath Ancient Portals et Conjuring The Obscure), cet opus porte la signature de Abythic, trio qui a lui aussi vu la nuit en Allemagne. De la formation originelle en 2015, ne subsiste que MDB (Marco Di Bartolo pour l'Etat civil), lequel a occupé à peu prêt tous les postes au sein du groupe et dans une foultitude d'autres croupissant dans les artères les plus obscures de la scène death metal d'Outre-Rhin. Car le gaillard au physique patibulaire a le genre chevillé aux notes, auquel il prête une expression évidemment sévère et ténébreuse, morbide et rocailleuse à tout le moins. Après des débuts fidèles à l'orthodoxie méphitique, Abythic négocie pourtant une nette évolution avec ce Dominion Of The Wicked qui fait plus que s'abîmer dans les entrailles d'un doom death aussi décharné que sinistre.
Composé de quatre pistes qui étalent leurs tentaculaires ramifications sur près de trente-cinq minutes aux allures de bloc indivisible et dont la première d'entre elles le remplit presque pour moitié à elle seule, son menu robuste et compact participe de ce glissement dans des limbes plus pesantes et mortuaires que brutales. Cette coloration funèbre confère aussi au matériau sculpté au burin par les Teutons des traits plus obsédants sinon mélodiques, à l'image des guitares entêtantes comme des scalpels sillonnant la chair qui irriguent le final de 'Endless Tides'. Les nappes brumeuses léchant l'entame de 'Augury Of The Doomed' ne cultive non plus pas autre chose que cette ambiance sépulcrale quoique toujours aussi grumeleuse. Mais c'est bien le quart d'heure que dure le massif et inaugural 'At The Thresholds Of Obscurity' qui coule ce troisième album dans les méandres granitiques d'un doom rude et cendreux. Chant abyssal et guitares taillées dans une roche froide battue par la pluie guident cette complainte dont les aspérités et la progression ankylosée atténuent le monolithisme tombal. Monumentale à tous points de vue, cette épaisse dalle de doom death forme donc la première marche d'un seul et unique édifice que poursuivent et achèvent les trois titres suivants lesquels, loin de l'enfoncer plus encore dans les entrailles de l'indicible tendent au contraire à l'en extraire peu à peu au travers de lueurs plus atmosphériques bien que toujours cryptiques. En faisant évoluer son death vers un art plus lourd et lancinant, Abythic déploie une grandeur qu'on ne lui connaissait pas et accouche de son album le plus maîtrisé à ce jour. (15.03.2021 | LHN) ⍖⍖⍖
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