16 août 2021

KröniK | Carcolh - The Life And Works Of Death (2021)




Si la France n'a jamais été une terre de prédilection pour le doom, elle n'en héberge pas moins d'excellents prêtres, de Barabbas dans une veine sabbathienne à Ataraxie dans un registre (beaucoup) plus extrême et funéraire, pour ne citer que deux exemples de cette insoupçonnée vitalité. Les adorateurs du genre dans son expression traditionnelle sont même particulièrement comblés en ce début d'année 2021 puisque un mois à peine après le premier album de Conviction mené, entre autres, par l'âme de Temple Of Baal, Amduscias et le guitariste Frédéric Patte-Brasseur d'Ataraxie justement (le doom est une petite famille), c'est au tour de Carcolh de venir poser une bûche dans notre âtre qui ne demande qu'à être chauffé. Si les Bordelais ne peuvent avancer un pedigree comme celui des membres de Conviction, ils n'en ont pas moins le doom chevillé au corps, genre qu'ils ont honoré au sein des défunts Marble Chariot ou Hexenjäger (qui n'a pas officiellement disparu mais c'est tout comme). Et cela s'entend et ce sent à l'écoute de The Life And Works Of Death, lequel transpire une affliction plombée par tous les pores, vibre sous les coups de boutoir d'instruments branchés aux entrailles de la terre. La superbe tenue (nous y reviendrons) de cette enclume n'étonnera pas les fidèles qui n'avaient déjà pas manqué de succomber aux charmes doloristes de Rising Sons Of Saturn (2018), premier long des plus prometteurs. Que le précieux label Sleeping Church Records (The Bottle Doom Lazy Band, Father Merrin) publie ce deuxième opus est de toute façon révélateur du potentiel, immense, coulant dans les veines de ce groupe assurément promis à un avenir radieux. Si tant est que ce qualificatif sied réellement à cet art de la douleur que les Français sculptent au burin avec un sens de la dramaturgie bouleversante. 




Superbe, l'artwork taillé pour un format vinyle, assure un premier contact attirant avec cette offrande habillée dans un noble digipack. Mais surtout il y a le chant de Sébastien Fanton, prescripteur de cette indispensable solennité, qui ferre le pèlerin et ce, dès le monumental 'From Dark Ages They Came', amorce foudroyante de désespoir. En près de neuf minutes, la messe est (déjà) dite. Et bien dite. Cette voix puissamment émotionnelle nous tire des larmes tandis que les quatre autres frères bétonnent une cathédrale dont les lourds  arcs-boutants sont plantés dans une roche granitique. Neuf minutes d'un orgasme funèbre qui monte peu à peu en une déchirante élévation. En une seule composition, Carcolh emporte tout dans son sillage pétrifié, accouchant pas moins d'une des plus belles prières récitées en hommage à la déesse doom entendues depuis très longtemps. A l'autre bout se dresse 'Sepulchre', sentinelle de plus de dix minutes au compteur, elle aussi portée par ce chant creusé dans le marbre, qui procure des frissons figés dans une inexorable tristesse. Les Français prennent leur temps pour conduire cette procession aussi touchante que sévère, engluée dans une contrition éternelle. Entre ces deux pavés s'épanouissent quatre plaintes égales en magnificence mélancolique, tertre d'un doom épique d'une grande pureté de ton et de traits. Serti de vocalises aigües, 'Works Of Death' affiche des couleurs très heavy tandis que 'The Blind Goddess' et 'When The Embers Light The Way' ont des allures de foreuses telluriques. Le plus ramassé 'Aftermath', étonne par sa tendresse squelettique, manière de respiration néanmoins dramatique adossée à un ensemble grondant d'une force tragique. Avec The Life And Works Of Death, Carcolh fait mieux que transformer l'essai, il forge le pur joyau d'un doom traditionnel tel qu'il devrait toujours sonner, poignant et grave. Nous attendons maintenant la suite avec une impatience gourmande...  (28.02.2021 | LHN) ⍖⍖⍖

 

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