Un film signé Allen Smithee, dont on rappelle qu'il s'agit du nom derrière lequel se cache un metteur en scène américain qui refuse d'en assumer la paternité, n'augure donc jamais rien de bon. Au cas particulier, Une poignée de plomb devait être réalisé par Robert Totten, qui a surtout besogné à la télé (la série Gunsmoke) mais durant le tournage, il se fait virer par Richard Widmark qui le remplace par Don Siegel. Pour autant et nonobstant le fait qu'ils venaient de travailler ensemble à l'occasion de Police sur la ville (1968), la relation entre le vieux comédien et le futur auteur de Dirty Harry se révèle plutôt difficile. Si Death Of A Gunfighter n'est pas l'inavouable ratage redouté, il ne porte toutefois guère la griffe de Siegel qu'on devine assurer le minimum. En outre, il souffre d'une esthétique un peu trop télévisuelle, à l'instar d'autres productions contemporaines de la Universal, des westerns notamment, tels que Cinq cartes à abattre de Henry Hathaway ou Pendez-les haut et court, d'un niveau bien supérieur cependant. Ce qui est d'autant plus regrettable que le scénario n'est pas intéressant, bien au contraire. Il croise deux thèmes westerniens classiques : la mutation de l'Ouest à la fin du XIXème siècle avec l'irruption de la modernité et l'association de notables d'une petite ville désireux de se débarrasser de personnes violentes devenues encombrantes. Mais à la place des traditionnels bandits, c'est le vieux marshal, dont l'autoritarisme anachronique les dérange, que les habitants d'une bourgade en pleine transformation urbaine veulent voir partir. Une poignée de plomb nous montre l'agonie de l'Ouest dont il ne reste plus rien de l'héroïsme originel. Autrefois loué pour son courage et sa ténacité, Frank Patch n'est plus qu'un dinosaure ; il n'a pas sa place dans la modernité. Face à lui, les villageois ne sont qu'un ramassis de lâches capables sans remord d'abattre quelqu'un dans le dos... Le visage sillonné par toute une géographie de rides aussi arides que la sécheresse de son personnage, Richard Widmark domine le film, tranquille et désenchanté. Dommage toutefois que John Saxon n'ait hérité que d'un rôle bâclé. Western crépusculaire et attentiste, Une poignée de plomb se révèle sympathique, sur un mode toutefois mineur loin du nihilisme désespéré et crasseux d'un Sam Peckinpah ou de la force ironique d'un Arthur Penn... (vu le 20.02.2021) ⍖⍖⍖
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