La pochette aux couleurs du gore, habillant Ancestral Punishment, ne doit pas vous tromper, Bisönte débite bien les bûches promises par son nom qui évoque quelque chose de pachydermique, une bête à laquelle on n'a pas trop envie de se frotter et qui semble s'enraciner depuis toujours dans les paysages qui l'ont vu naître. Ce groupe est espagnol, ce qui n'est guère surprenant puisqu'il est signé par l'écurie madrilène Xtreem Music, et cette enclume est la première qu'il martèle. Le fait qu'il héberge dans ses rangs deux filles, l'une, María J. Lladó, prêtresse chargée de couvrir ces rondins de sa voix monotone (dans le bon sens du terme) et brumeuse, la seconde, Andrea Trujillo, maîtresse de la rythmique velue avec sa basse sismique, ne devrait pas laisser indifférent ceux qui, comme votre serviteur, a souvent les oreilles dans le slip. Le doom stoner (à moins que cela ne soit l'inverse) fourré d'une dose de féminité n'étonne toutefois plus désormais, ce n'est donc pas de ce côté-ci du manche qu'il faut chercher la personnalité de ce jeune quatuor mais davantage dans les parcimonieuses lueurs hantées qui nimbent ses compos ('Two Worlds') et plus encore dans le recours à quelques borborygmes caverneux qui témoignent d'un ancrage lointain dans les viscères d'un death metal putride, qu'explique sans doute la participation de Vincente Paya, le guitariste de Golgotha, la figure tutélaire du genre en Espagne.
Bisönte, c'est donc du gras, du monolithique, du qui n'enclenche jamais la seconde. Il y a même là une sorte de jusqu'auboutisme comme si le combo cherchait faire exploser le compteur Geiger, à repousser les limites d'une pesanteur tellurique. Pinacle de l'album du haut de ses dix minutes au garrot, 'The Arrival Of Our End' possède ainsi quelque chose d'une procession terreuse, menacée par un ciel ténébreux, qui semble ne jamais vouloir terminer. Bref, c'est du stoner englué dans une bauge aux relents de barbaque avariée et Ancestral Punishment, une massue qui écrase tout dans son sillage, à l'image de ce ruminant échappé du fond des âges. Les musiciens, le cuir épais tanné par un soleil plombé, sont à l'unisson de cette lenteur pétrifiée qui, même lors d'une accélération avortée, ne se dégraisse jamais, comme l'illustrent les dernières mesures du morceau-titre. Seule la conclusion 'New Beginning', par sa tranquillité osseuse, brise quelque peu cette impression de torrent boueux qui s'abat sur nous, manière d'achever l'écoute sur une note plus posée dont le calme apparent masque cependant mal le désespoir qui l'enserre. Bisönte réalise une entrée aussi convaincante que fracassante dans la scène stoner doom avec une première bûche couverte d'une croûte patibulaire que cisaillent un chant féminin en apesanteur et de timides effluves spatiales. (15.02.2021 | LHN) ⍖⍖⍖
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