11 juin 2021

KröniK | Yuggoth - Forgotten Lust (1994)




Après avoir déterré l'offrande avortée de In Articulo Mortis (Testament), le label Herbert West Productions poursuit son travail d'archéologue de la chapelle black et death française des années 90 en ressuscitant Forgotten Lust, unique trace discographique de Yuggoth, éphémère formation (comme bien d'autres) qui, à sa modeste mesure, a participé à l'édification de la scène death metal hexagonale. S'il serait exagéré de voir dans ce qui n'est après tout qu'une démo, le gemme oublié  d'un groupe promis à un brillant avenir, la seconde vie qui lui est offerte, vingt-six ans après son accouchement, ravivera des souvenirs émus chez tous ceux qui ont vécu cette période bénie pré-internet où les démo-tape circulaient chez des VPCistes passionnés tandis que des fanzines non moins passionnés se chargeaient de prêcher la bonne parole, nous faisant découvrir des myriades de petits combos ignorés des grands magazines. En cela, Yuggoth témoigne de cette effervescence qui poussait des gamins à graver une poignée de compos sur cassette et à écumer les MJC locales. (Trop) Nombreux sont ceux à n'avoir jamais dépassé ce stade. Comme Yuggoth donc, qui se saborda peu après avoir capturé Forgotten Lust. Six pistes (dont une outro) jusqu'alors disponible sur la toile que Herbert West Productions a ainsi le bon goût de rééditer sous la forme de la bonne vieille tape des familles (limitée à cinquante exemplaires) et que complètent un nouvel artwork et deux titres bonus en une édition particulièrement soignée. Quant au contenu, s'il ne se départit pas des maladresses propres aux premières fois, il transpire cette énergie obscure qui est souvent l'apanage de ces créations artisanales. Chantres d'un metal de la mort plus mélodique que grumeleux, plus lancinant que survolté, les Français originaires du Vaucluse ne sont pas sans idées, usant avec parcimonie d'un chant clair, tapissant leur caverne de claviers pour une atmosphère sombre et irréelle que teinte une sensualité cryptique.  Beaucoup de charme suinte de cette démo comme échappée de temps anciens. Yuggoth aurait sans doute mérité de poursuivre l'aventure mais la belle réédition de cette tranche de (petite) histoire lui fournit une juste oraison. On croisera plus tard certains de ses membres dans Fairlight, qui lui non plus ne franchira pas le stade de la démo et dans Malmonde. Mais le guitariste Bruno Michel partagera cependant la route de Brett Caldas-Lima au sein d'un Kalisia malheureusement lui aussi disparu. Un bilan en demi-teinte qui illustre toutefois que dans ces modestes formations bouillonnait un talent certain auquel il ne manquait peut-être que de la chance, du temps voire de l'envie, pour être fructifié... (28.12.2020 | LHN) ⍖⍖
 

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