On ne mesure pas toujours assez l’impact que Burzum, légende noire du black metal, a pu avoir sur tout un pan de cette scène. Si Emperor reste le père spirituel du black symphonique et Darkthrone l’influence majeure de toutes les hordes embourbées dans le true black primitif, que serait le black suicidaire sans Varg Vikernes le révéré ? Rien assurément. Prenez par exemple Forteresse, duo enraciné dans le Canada enneigé (le Québec pour être précis), contrée dont on se demandait si elle parviendrait un jour, alors qu’elle possède le terreau propice à l’émergence d’une telle musique, à engendrer des défenseurs de l’art noir intéressants, il est évident que ses deux géniteurs, Moribond et Athros connaissent sans doute par cœur les Tables de la Loi écrites par le Count Grishnackh, aussi bien dans la forme (son pollué, rythme lancinant, ambiances crépusculaires) que dans le fond (un discours nationaliste revendiqué). Il y aura bien quelques gauchistes bien pensants pour s’en offusquer. Tant pis. Ou tant mieux.
Faisant suite au remarqué Metal noir québécois, Les hivers de notre époque, qu’habillent de superbes peintures de Cornelius Krieghoff, poursuit le chemin emprunté au milieu des congères, un chemin bâti autour de longues complaintes nocturnes, hypnotiques et répétitives comme il se doit, enveloppées par les atmosphères distillées par des claviers sinistres et dont s’échappe un chant hurlé en français qui appelle à la résistance patriotique (“ Fils de patriotes – Pères du renouveau ” est des plus éloquents). Subdivisée en trois parties, c’est une œuvre à la gloire de la nature, de la nuit et d’un passé glorieux, fait de combats pour la liberté et l’indépendance, que les textes en langue nationale d’une sombre poésie contribuent encore à magnifier davantage. Et si Forteresse n’invente rien (ce n’est pas le but de toute façon), il réussit parfaitement à rendre palpable le souffle noir et hivernal qui balaie ces paysages drapés d’un manteau blanc qu’une nuit éternelle vient recouvrir de ses tentacules. “ Ancienne Voix ”, “ Ténèbres ”, “ Les Corbeaux ” et “ Déluge blanc ” sont comme un venin obsédant qui racle les âmes et les chairs ; ils suintent un tel désespoir, une telle tristesse engourdie par l’obscurité qu’ils finissent par atteindre une beauté insoupçonnée. Héraut du metal noir québécois, Forteresse donne ses lettres de noblesse à une chapelle qui se nourrit non pas d’un satanisme bas du plafond auquel ne croit d’ailleurs que bien peu parmi les brûleurs d’églises mais plutôt de ses racines quelles soient géographiques ou historiques. (23.05.2008) ⍖⍖⍖
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire