Si vous vous demandiez à quoi Jarno Salomaa peut bien occuper ces journées alors que Shape Of Despair s'est endormi pour une durée indéterminée depuis 2015 et Monotony Fields, The Will, première pierre (tombale) d'un nouvel édifice baptisé Counting Hours, vous en fournit la réponse. Car en 2015, le Finlandais a fondé ce projet parallèle avec d'autres joyeux drilles de ses connaissances. Au départ simple duo imaginé avec le chanteur Ilpo Paasela (The Chant), l'entité s'est ensuite muée en un vrai groupe à part entière, puisant dans l'intarissable vivier national en matière de spleen pour compléter son line-up. L'ex-Colosseum Sameli Köykkä s'est placé derrière les fûts, Tomi Ullgren, déjà comparse de Salomaa au sein de Shape Of Despair, assure la seconde guitare tandis que Markus Forsström, qui prend également part à The Chant, tient la basse. Counting Hours est une histoire d'amitié mais aussi de famille, celle de ces musiciens qui ont la mélancolie chevillée aux notes. Question de climat et de géographie sans doute. Toujours un peu paresseux (à moins qui ne s'agisse de perfectionnisme), Jarno a pris quand même son temps pour matérialiser sur bande le fruit de cette réunion. Une alléchante démo en 2016, puis plus rien, jusqu'à cette première offrande longue durée. Compte tenu de sa qualité, on n'en voudra pas trop à ses géniteurs de n'offrir finalement que cinq vrais titres inédits, le reste de l'album étant représenté par une intro, longue néanmoins de presque trois minutes mais un peu inutile quand même, ainsi que les trois-quarts du brouillon qui l'a précédé, seulement amputé de 'Wintry Insight'. Dans le registre des choses qui fâchent (un peu), nous pourrions aussi reprocher à Counting Hours de ne jamais vraiment quitter le sentier très battu du gothic dark doom qu'il exploite certes avec une inoxydable maîtrise accouplée à un sens inné de la mélodie blafarde, des atours gelés mais sans aucune espèce d'originalité.
Ainsi, cette façon de tisser des lignes de guitares entêtantes, véritables vigies perçant la brume, nous évoque Katatonia ('Atonement' et sa morsure comme un fantôme échappé de Brave Murder Day), certaines vocalises rappellent les travaux de Moonspell ('Saviour') voire ceux de Steven Wilson, quoique de manière assez lointaine ('To Exit All False'). Finalement, c'est peut-être au défunt Rapture auquel on pense le plus, ce qui n'a rien de surprenant puisque Salomaa en était la tête pensante, mais un Rapture moins funéraire, plus lisse bien que tout aussi glacial. Reste que ce galop d'essai séduit immédiatement, il ferre d'emblée l'auditeur en quête d'une bande-son pour affronter les longues nuits d'hiver. Petits bijoux d'écriture et d'ambiance, 'Profound', 'Buried In The White' et ses notes osseuses sans oublier les déjà cités 'Atonement' ou 'Saviour', sont réellement irrésistibles, chapelles figées par le froid mais qu'un mince rai de lumière vient réchauffer. Sans doute, eu égard aux musiciens en présence, en attendions-nous davantage mais force est de reconnaître que Counting Hours signe un premier jet efficace et très bien fait, sorte de leçon de dark doom à la scandinave, auquel il ne manque en définitive qu'un peu plus de personnalité pour s'élever au-dessus de la mêlée. The Will surgissant cinq ans après que le groupe a été formé, souhaitons que celui-ci se montre désormais plus fertile et qu'il partage avec son aîné Shape Of Despair la grandeur et non la regrettable apathie... (18.10.2020 | MW) ⍖⍖⍖
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