Qui aurait pu croire, en 1987, que le gamin venu de nulle part, 20 ans tout mouillé, recruté par le Madman pour remplacer Jake E. Lee, s'imposerait finalement comme l'un des meilleurs disciples de Black Sabbath, réunissant dans sa seule carcasse le jeu tellurique de Tony Iommi et la voix de canard enrhumé d'Ozzy Osbourne ? Peu de monde assurément. Les années passant, l'homme a pris de la bouteille, et son physique des allures de biker patibulaire et pileux. Le Sab' ayant toujours coulé dans ses veines, c'est très naturellement qu'il s'est lancé avec le batteur Joey Castillo (Queens Of The Stone Age) et le bassiste Rob "Blasko" Nicholson, dans l'aventure du tribute band en honneur à son père nourricier, baptisé tout simplement Zakk Sabbath (ça ne s'invente pas). Au départ destiné à se faire plaisir sur scène en piochant dans les albums du line-up historique du dinosaure anglais, concerts immortalisés sous forme de bootlegs disponibles sur le net, le groupe s'est enfermé en studio non pas pour graver un simple album de reprises mais pour reprendre la totalité du premier effort éponyme de Black Sabbath afin d'en célébrer le cinquantième anniversaire. Le trio lui a donné pour nom celui de Vertigo, référence évidente au label qui édita à l'origine cet acte fondateur du heavy metal. S'il est bien entendu permis de s'interroger quant à l'utilité d'une telle démarche, force est pourtant de reconnaître le caractère orgasmique de cet EP qui érige puissamment les murs de ce temple dédié au sacro-saint Riff rédempteur.
De toute façon, avec un tel matériau entre les doigts épais de ce grizzly de la six-cordes, comment cet album pourrait-il être mauvais ? On devine que le trio cherche surtout à prendre son pied en revisitant des compos qu'il connaît par cœur, mais l'authenticité d'un enregistrement que Zakk Sabbath a voulu le plus proche possible de l'esprit d'origine lui insuffle un cachet bien particulier, à la fois rugueux et massif. Comme son patron, l'opus a donc été gravé dans des conditions rudimentaires, en deux prises. Dès ce 'Black Sabbath' sinistre et grumeleux, on comprend que Zakk renvoie décidément dans le bac à sable de la maternelle tous les apprentis sorciers qui reprennent le répertoire des Anglais. Car finalement, qui mieux que lui peut se glisser dans les habits d'Ozzy sans passer pour un banal copieur ? Toutes ces années passées à épauler l'ancêtre ont imprimé chez l'Américain ce mimétisme aussi troublant que sincère. Avec fidélité et malice, le trio se réapproprie ce mètre-étalon de la musique qui nous est si chère, qu'il enduit d'une couche plus rocailleuse. Le point G est atteint lors de l'énorme medley où s'enchaînent 'Wasp', 'Behind The Wall Of Sleep' et 'N.I.B.'. Et s'il échoue à capter l'aura originelle de toute façon impossible à retranscrire réellement (nous ne sommes plus en 1969, époque où tout était encore à faire), Zakk et ses copains assurent l'essentiel : rendre avec la révérence attendue un hommage passionnel quasi charnel à un album culte qu'ils dépoussièrent avec intelligence. Venant de n'importe qui d'autre, nous aurions sans doute fait la fine bouche face cet exercice mais venant de celui qui a accompagné si longtemps Ozzy, on s'agenouille et on écoute ! (17.09.2020 | MW) ⍖⍖⍖
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire