25 janvier 2021

KröniK | Red Moon Architect - Emptiness Weighs The Most (2020)




Véritable AOC, le (funeral) doom death finlandais est une petite famille qui voit ses membres régulièrement se croiser dans divers projets qui partagent tous une même propension à ruminer un spleen blafard et éternel. Ainsi, une bonne part de l'équipage composant Red Moon Architect besogne également au sein de Aeonian Sorrow tandis que le batteur Saku Moilanen et l'ancien chanteur Mikko Heikkilä, ont leurs noms associés à celui de Tuomas Saukkonen (Wolfheart, Dawn Of Solace...), figure tutélaire de cette chapelle aussi petite par la taille qu'elle est grande par sa valeur. Et nous vous épargnerons tous les autres groupes, actuels ou passés, qui relient ces Finlandais les uns aux autres. Non contents d'avoir déjà enfanté en début d'année l’EP A Life Without de son faux frère jumeau Aeonian Sorrow, Ville Rutanen (chant), Taneli Jämsä (guitare) et Jukka Jauhiainen (basse) ont trouvé le temps d'offrir un successeur à Kuura, quatrième chemin de croix que Red Moon Architect a gravé l'an dernier ! C'est dire la fertilité de ces musiciens qui ont le doom chevillé aux notes. Bien sûr, certains ne manqueront pas de s'interroger quant à l'utilité pour ces Finlandais de mener de front deux entités dont les traits qui les rapprochent se révèlent plus nombreux que ceux qui les séparent. Les deux groupes s'enfoncent à l'intérieur d'un même caveau gelé où résonnent des voix masculines caverneuses, soulignées par un pinceau féminin éthéré cependant que les claviers étendent leur suaire brumeux comme une toile dont chaque fil est une note de désespoir. 

Mais qu'importe car l'essentiel est ailleurs, notamment dans le fait de pouvoir butiner deux excellentes formations œuvrant dans cet art de la douleur contrite qui nous est si cher. Et Emptiness Weighs Of Most ne peut qu'assouvir notre soif de glaciale mélancolie même s'il faudra chercher ailleurs la corde pour se pendre. Car, comparé à Shape Of Despair (première époque), Profetus sans parler de Tyranny, Red Moon Architect délivre une expression du genre extrêmement mélodique qui tend même à le devenir de plus en plus, comme en témoigne l'écart qui sépare cette offrande de sa devancière, plus sombre et massive. Là où Kuura n'affichait que trois pistes pour quarante minutes engourdies, ce cinquième opus s'articule au contraire autour d'une architecture beaucoup plus trapue. Or c'est sans doute justement dans ce format plus traditionnel que les Finlandais tirent leur épingle du jeu, trouvant un admirable et juste équilibre entre tristesse inexorable et force entêtante, qui les fait glisser vers le gothic doom d'un Rapture, comme le confirme un 'Chained' presque accrocheur. Et quand jaillit le chant de Anni Viljanen, la beauté l'emporte sur la douleur, à l'image de 'Rise', qu'elle grignote avec élégance, et plus encore du terminal et cristallin 'My Beloved'  où  la belle domine sans partage. Les grincheux et autres mollahs argueront que c'est du doom pour votre petite sœur en pleine crise d'acné mélancolique mais il est quand même permis de goûter à la puissance romantique de ce Emptiness Weights Of Most, perle de givre plus lumineuse que ses devancières, qui séduira tous les amateurs de doom finlandais car ils y picoreront ces mélodies aussi froides qu'entêtantes et cette façon assez unique de capter la poésie blême et nocturne de ces paysages englués dans un hiver éternel....(26.09.2020 | MW) ⍖⍖⍖

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