Eu égard à sa luxueuse affiche qui réunit Spencer Tracy, Richard Widmark, Robert Wagner et Jean Peters sous la houlette de Edward Dmytryk, La lance brisée reste un western frustrant. D'où provient la déception qui accompagne son visionnage ? Transposition habile et intéressante dans un cadre westernien de La maison des étrangers (1949), qui n'est d'ailleurs pas l'oeuvre la plus inspirée de Joseph Mankiewicz, Broken Arrow souffre déjà du travail plutôt statique du metteur en scène qui abuse de plans larges absorbant la passion et la tension d'un scénario qui ne devrait pourtant pas en manquer. Celui-ci pêche également quelque peu par excès, explorant de nombreuses pistes sans vraiment en approfondir aucune, comme si les 90 minutes réglementaires du film l'en empêchaient. Drame familial, charge antiraciste et illustration des mutations industrielles qui commencent à transformer l'Ouest américain à l'aube du XXème siècle, La lance brisée est un peu tout cela à la fois.
Bavard qui plus est, il tire néanmoins sa force, outre sa beauté plastique (très belle photographie de Joseph MacDonald), de la parfaite direction d'acteurs d'un Dmytryk qui a su admirablement choisir ses comédiens. Spencer Tracy endosse un rôle qu'il connait bien, celui du patriarche, mais d'une manière bien plus convaincante que dans Le maître de la prairie (1947) de Elia Kazan tandis que Richard Widmark, attachant et loin du simple méchant de service, parvient à exprimer toutes les désillusions de son personnage de fils aîné mal aimé. La scène où ils s'affrontent pour la derrière fois et qui voit Ben déverser toute sa rancoeur au visage de son père constitue un des moments les plus forts du film. Si Robert Wagner fait montre d'un jeu plus épais que d'ordinaire, annonçant ses grandes performances à venir (Le temps de la colère, La neige en deuil), on regrettera que Jean Peters, actrice pourtant assez atypique, soit mal utilisée dans la peau conventionnelle de la petite amie. Le résultat est un western agréable qu'on prenait du plaisir à voir à la télévision quand celle-ci daignait encore diffuser des vieux films. Combien de cinéphiles ont été biberonnés par ces bobines dont FR3 s'était fait une spécialité... Une époque définitivement révolue... (vu le 26.09.2020) ⍖⍖
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