De Eugenio Martin, nous gardons surtout en mémoire certains de ses westerns (Pancho Villa, Les quatre mercenaires d'El Paso) et Terreur dans le Shanghai Express, pellicules sympathiques au demeurant bien que souffrant soit de manque de moyen soit d'une décontraction qui frise le dilettantisme voire les deux. La très bonne tenue de A Candle For The Devil n'en est donc que plus surprenante. Le soin apporté à la mise en scène, à l'éclairage, à l'esthétique étonnent ainsi agréablement de la part de cet artisan du bis européen. Si son titre semble annoncer le cortège horrifique habituel composé de messes noires et autres rites diaboliques, il n'en est en fait rien car son récit s'installe dans un cadre bien plus concret. La violence graphique et giallesque qui voit Marta utiliser toutes sortes d'ustensiles contondants (couteau de cuisine, hache etc...) éclabousse certes l'écran mais l'horreur nait avant tout de cette morale catholique qui corsète encore l'Espagne d'un Franco qui pourtant à la fin de son règne avait commencé à desserrer cet étau sociétal. Le film nourrit sa sève de ce puritanisme pour construire un canevas gonflé de pulsions refoulées, d'une sexualité trouble et malsaine.
Dans cette pension tenue par deux soeurs, (forcément) vieilles filles de surcroit et qu'on imagine presque liées entre elles par des relations incestueuses, l'irruption de touristes féminines venues d'Europe est perçue comme une souillure. Alors qu'elle épie vicieusement des adolescents pré pubères batifolant nus dans l'eau (on devine même furtivement le kiki d'un gamin ! ), Marta s'enfonce peu après dans des branchages qui la griffe comme une punition masochiste visant à expier ses péchés. Rongé par la perversion, tout le film est ceint d'une religiosité morbide. C'est ce qui fait tout le sel de cette bobine qu'il ne faut cependant pas aborder comme une charge contre la société puritaine de l'Espagne franquiste, qui intéresse moins Eugenio Martin que faire naître les frissons. L'oeuvre baigne bien dans le baquet du pur film de genre et non dans du Bunuel ! Nous voilà rassurés ! Sans être exempt de défauts (l'intrigue est conduite mollement et on peut trouver facile que toutes les filles échouent comme par hasard dans l'hôtel des deux frangines), A Candle For The Devil s'élève pourtant clairement au-dessus du lot, ne serait-ce déjà par la présence de Judy Geeson, actrice un peu oubliée aujourd'hui, qui promena néanmoins sa blondeur anglaise dans ce cinéma d'exploitation européen des années 70 que nous chérissons tant entre le Doomwatch de Peter Sasdy ou le Sueur froide dans la nuit de Jimmy Sangster en passant par les plus respectables Brannigan de Douglas Hickox avec John Wayne et L'étrangleur de Rillington Place de Richard Fleischer. (vu le 06.09.2020)
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