1 octobre 2020

CinéZone | William Keighley - La dernière rafale (1948)




De loin, La dernière rafale ressemble à un petit polar de série B. William Keighley fait partie de ces réalisateurs qui n'ont suscité aucune chapelle, aucun culte, même si son nom reste associé au succès des Aventures de Robin des Bois (1938), qu'il signe à quatre mains avec Michael Curtiz, et à quelques bobines riches en douilles des années 30 (Les hors-la-loi, Guerre au crime...). Sa vedette, Mark Stevens, jouit d'une aura plus modeste encore, en dépit de sa participation à quelques classiques tels que L'impasse tragique (1946) de Henry Hathaway ou La fosse aux serpents (1948) de Anatole Litvak, qui sertissent une carrière curieuse qui le verra passer derrière la caméra non sans un certain talent (La vengeance du balafré). Mais, outre l'apport de brillants seconds couteaux sans lesquels le cinéma américain d'alors n'aurait pas la même saveur (John McIntire, Ed Begley, Lloyd Nolan), il y a Richard Widmark dont ce n'est que la deuxième apparition à l'écran après Le carrefour de la mort. Il y incarne à nouveau le vilain mais Alec Stiles, le chef de bande qu'il compose, est moins gouailleur et ricanant que Tom Udo, plus dandy en fait. Plus trouble également et exsudant une homosexualité latente (la façon dont il allume la cigarette de Mark Stevens ou le fait de discuter avec lui au bord d'un lit...). 



En réalité, La dernière rafale est à ranger parmi les meilleurs films noir de la Fox (ou pas). Le scénario se révèle extrêmement bien écrit, la photographie en noir et blanc croquée par Joseph McDonald (La ville abandonnée) est un modèle du genre, qui plonge les décors sordides dans un réaliste miteux (la cachette de l'arsenal, la chambre d'hôtel) et participe d'une dramaturgie implacable. Keighley y trouve l'écrin idéal pour dérouler une mise en scène nerveuse et inventive dans un style semi documentaire à la gloire du F.B.I de Edgar Hoover dont les mots ouvrent le récit. Si nous aurions préféré voir à sa place un Cornel Wilde, auquel il ressemble un peu, Mark Stevens se veut plutôt convaincant quand bien même Widmark l'écrase par sa seule présence. La dernière rafale est un remarquable film noir, écrit et filmé au cordeau, qui palpite d'une tension qui jamais ne faiblit. (vu le 02.08.2020)

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