13 octobre 2020

CinéZone | Joseph L. Mankiewicz - La porte s'ouvre (1950)



Réalisateur de gauche, Joseph Mankiewicz se fend avec La porte s'ouvre, traduction idiote de No Way Out (qui signifie l'inverse !), d'un brûlot antiraciste, l'un des premiers films hollywoodiens à mettre en vedette un acteur noir même si celui-ci, Sidney Potier, n'est crédité qu'en quatrième position au générique, après Stephen McNally ! Audacieuse et courageuse, il s'agit d'une oeuvre importante, longtemps interdite dans les Etats du Sud et à la télévision américaine mais qui n'est cependant pas exempte de faiblesses. S'ils nous épargnent une vision manichéenne (la haine prolifère aussi bien chez les noirs que chez les blancs), Mankiewicz et son scénariste Lesser Samuels commettent la même erreur que les antiracistes d'aujourd'hui à savoir opposer racisme et progressisme sous le seul angle de la lutte des classes et de l'instruction. Pour eux, le raciste est forcément peu éduqué, en bas de l'échelle sociale, quand ils ne le psychiatrisent pas carrément (Ray Biddle est dépeint comme un fou) alors que les progressistes, ceux qui sont ouverts à l'autre, sont des docteurs, des gens instruits...ou des femmes ! La réalité se révèle bien entendu et comme souvent, plus complexe que cette peinture caricaturale opposant le gentil médecin de couleur au vilain caïd blanc.




Mais peut-être cette vision simpliste et binaire était-elle nécessaire pour faire passer ce vibrant et humaniste message, treize ans avant la Marche pour les droits civiques. Encore une fois, le cinéma (américain) démontre quelle puissante machine à modeler, à transformer, la société il est. En outre La porte s'ouvre s'enlise quelque peu à mi-chemin tandis que la dernière partie, où l'on bascule dans le polar, parait artificiellement collée au reste même si elle participe du propos développé tout du long, montrant Biddle, gravement blessé à la jambe, obligé de supplié celui pour qui il voue une haine viscérale et paranoïaque. Widmark trouve là un personnage de xénophobe taillé pour lui face à un Sidney Poitier, qui deviendra son ami (ils se retrouveront bien plus tard dans Les Drakkars et dans Aux postes de combat) et déjà excellent dans la peau de ce jeune docteur qui doit lutter contre le racisme ambiant. Quant à Linda Darnell, elle hérite peut-être du plus beau rôle, bien dirigée par Mankiewciz (avec lequel elle partage alors sa vie). Celui-ci livre une mise en scène parfaitement maîtrisée (cf. la façon dont la caméra suit Luther Brooks au début du film).  (vu le 08.08.2020)





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