Le port de la drogue nous renseigne sur le contexte (géo) politique de la Guerre froide durant la première moitié des années 50 et ce, des deux côtés de l'Atlantique. Du côté des Etats-Unis, le film illustre la propagande anti rouge qui sévit dans le pays et à tous les niveaux, alors même que Fuller insiste finalement moins sur la fièvre communiste dont souffrent Joey et sa bande que sur leur caractère de crapules des bas-fonds. Côté français, où le PCF est alors un parti politique puissant, l'oeuvre est pourtant jugée agressivement anti communiste, poussant le distributeur à en corriger totalement le sens par un simple changement de dialogues et de titre. Le microfilm dérobé par le pickpocket n'est plus lié à un complot communiste mais à un banal trafique de drogue ! La manière dont le récit est plus qu'édulcoré mais carrément transformé tient du cas d'école et semble totalement ahurissant aujourd'hui où l'on préfère recourir à une censure plus franche quoique tout aussi condamnable. Mais ceci est un autre sujet.
L'histoire autour de Pickup On South Street, aussi intéressante soit-elle, ne doit pas éclipser le fait qu'il s'agit d'un très bon Fuller, largement supérieur au Démon des eaux troubles, autre oeuvre de propagande anti rouge. Le metteur en scène fait ici preuve d'une belle virtuosité technique. La scène du début où Candy est suivi par des agents fédéraux annonce ainsi la maestria d'un De Palma. On se souviendra également longtemps de cette curieuse maison sur pilotis et la relation entre Richard Widmark et Jean Peters suintant la sexualité (la façon dont il fouille son sac à main comme s'il pénétrait son intimité, la bière qu'il lui verse sur le visage alors qu'elle est étendue...). Le couple qu'ils forment ne manquent pas de charme, lui, pickpocket malin et goguenard, elle, fille de mauvaise de vie dont les allures de putain cache une femme de coeur, aussi désirable que fragile. (vu le 18.07.2020) ⍖⍖⍖
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