Entité mystérieuse, Ôros Kaù s'offre à nous pour la première fois avec "Imperri Templum Aries". Peu d'infos circulent au sujet de cette matrice infernale si ce n'est qu'elle a vu la nuit en Belgique et qu'elle est le laboratoire d'une seule et unique créature. Que Déhà ait collaboré au projet derrière la console fournit cependant un premier indice précieux quant à l'exigence qui guide Ôros Kaù - l'homme n'est pas du genre à bosser avec des médiocres sans idées ni vision - et à la teneur de cette offrande qu'on pressent torturée, encrassée par une noirceur épidermique.
Extrêmement travaillés, l'artwork et le livret livrent un second indice concernant la philosophie qui a présidé à la réalisation de ce premier album. Satanisme et ésotérisme seront donc les combustibles dont se nourrissent ces quarante minutes aussi hallucinées que brutales. Si le caractère grouillant de compositions labyrinthiques connectent de prime abord "Imperii Templum Aries" à la galaxie des Blut Aus Nord et autre Deathspell Omega, l'expression à la fois incantatoire et par moment quasi hypnotique qu'il empreinte, pétrit cet opus d'une personnalité plus complexe. La reprise du 'Set The Controls For The Heart Of The Sun' de Pink Floyd, en fin de parcours, déjà butiné par 1349 en son temps à l'occasion de son méfait le plus controversé ("Revelations Of The Black Flame"), ce qui n'est pas un hasard, illustre moins les velléités psychédéliques de Ôros Kau, prégnantes toutefois, que sa manière de façonner un art noir vertigineux tant dans sa violence que dans sa négativité torrentueuse. Sous la véhémence d'un tempo déchaîné que libèrent une batterie tourmentée ('Shax') fourmillent une multitude de kystes qui rongent un programme inondant de toute part d'une sève corrosive.
Vicieuses et polluées, les guitares se frayent un chemin meurtri dans les replis obscurs de ces créations déglinguées qui ne filent jamais droit, lacérées, écartelées, violées par un vît bestial. Leurs traits contusionnés, 'Belial' ou 'AesmaDaeva' illustrent parfaitement la manière dont Ôros Kaù maltraite un matériau orthodoxe dans sa malfaisance mais fiévreux et tordu dans sa logorrhée ténébreuse. Aussi alambiqué et supplicié, chacun de ces huit titres est corrodé de l'intérieur par une rythmique maladive, à laquelle Déhà confère toute sa force reptilienne, et surtout par un chant superbement travaillé aux tessitures multiples, écorché souvent, plus grave parfois mais d'une profondeur abyssale toujours.
Il en résulte un opus qui excelle dans l'érection d'un black metal souterrain aux allures de cérémonies goétiennes, terrifiant, perturbant même, maelstrom riche d'une ambivalence torturée, qui dérange par son inconfort et fascine par sa puissance rituelle et obsédante. Il est un coup d'essai dont l'insolente maîtrise laisse entrevoir des lendemains plus démentiels encore... (14.06.2020 | LHN) ⍖⍖⍖
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