Claude Chabrol, Jean Yanne, Stéphane Audran
Claude Chabrol n'est jamais aussi bon que lorsqu'il introduit l'angoisse dans un cadre tranquille, matière de ses meilleurs films au ton très personnel. Le boucher en fait partie, intégrant un corpus fascinant qu'animent Les biches (1968), Que la bête meurt (1969), Juste avant la nuit (1971) ou Les noces rouges (1973). L'oeuvre démarre à la manière d'un documentaire sur la France (profonde) de la fin des années 60 avec la séquence du mariage. C'est une France qui semble être immobile, enracinée dans une ruralité, celle du Périgord au cas particulier, encore très prégnante, imperméable aux événements de Mai 68 et la révolution sociale et culturelle qui les accompagnent. Seul le personnage de l'institutrice, femme indépendante qui fume même dans la rue (!) constitue une entorse à ce monde corseté par le poids des traditions.
Puis tout doucement, l'inquiétude s'immisce dans ce décor verdoyant. Les cars de police apportent avec eux l'horreur de meurtres commis dans les alentours. Popaul (fabuleux Jean Yanne) est l'assassin. Mais Chabrol ne le juge pas ni mademoiselle Hélène. Entre le boucher, qu'un père brutal et la guerre, ont modelé, et la jeune femme venue de la ville, s'installe une relation singulière très finement dessinée, empreinte d'un profond désespoir. Le réalisateur nous fait oublier le dégoût que ces crimes sont censés nous faire éprouver et parvient à rendre attachant ce meurtrier chez qui on devine la solitude malheureuse. Si l'interprétation d'un naturel désarmant, est à louer, la mise en scène, d'une admirable maîtrise,confirme la maturité acquise par Chabrol. (vu le 12.07.2020) ⍖⍖⍖⍖
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire