11 août 2020

Golden Caves | Disergy (2020)




Si "Collision" a été gravé très peu de temps après l'inaugural "Bring Me To The Water", presque trois années séparent en revanche "Dysergy" de son prédécesseur. Inspiration en panne ou volonté de peaufiner ce troisième effort dans ses moindres détails ? Nul besoin de l'écouter en boucle pendant des heures durant pour affirmer que la raison de cette longue gestation réside moins dans une créativité fatiguée que dans le souci des Hollandais de soigner une nouvelle offrande que les amoureux de rock progressif conjugué au féminin attendaient impatiemment.

Ceux-ci ne seront donc pas déçus. Ils y goûteront encore une fois cette sève atmosphérique charriant une énergie électro aux confins d'une trip-hop envoûtante. Limpide et immersive, la prise de son impressionne, laissant à chaque instrument l'espace nécessaire pour bourgeonner, à l'image de la basse de Tim Wensink ou des percussions soyeuses de Erik Stein ('Samsara'). Cette section rythmique abat un travail fondateur, injectant à l'ensemble une force palpitante et souterraine.  D'une richesse délicieuse et diaphane, les arrangements étendent une couche dans laquelle la voix douce-amère de Romy Ouwerkerk peut tranquillement se frayer. Orchestrations discrètes ou piano dramatique bordent ainsi ce chemin intimiste qui questionne sur la déconnexion avec le monde qui nous entoure. Ce thème conditionne une expression introspective, propice à un voyage sonore intérieur.




Mais "Dysergy" n'en demeure pas moins un album plus mordant que méditatif, libérant cette puissance tranquille qui n'appartient qu'au groupe, lequel privilégie toujours le format court aux déliées et tortueuses arabesques évolutives. De cette accroche trapue découle un caractère très rock, comme l'illustre 'Chromosome', amorce dont les courbes ramassées ne l'exonère cependant pas de cette mélancolie sourde qui imprègne un menu souvent pulsatif ('Temperature'), enivrant toujours ('Dignity').

Battant d'un pouls hypnotique ('How To Care'), chaque composition est fignolée dans ses moindres recoins à la manière d'une orfèvrerie qui jamais ne s'enraye, dévoilant les trésors enfouis dans son intimité par petites touches pointillistes. Perle atmosphérique ('Hide & Seek'), respiration douloureuse ('Black Hound') voire minimaliste ('Somehow') ou oscillation percussive ('Happy Dreams") incarnent ce "Dysergy" que la voix aussi fragile qu'entêtante de Romy drape d'un suaire tâché d'amertume. Accouplées à cette rythmique extrêmement travaillée et une guitare éruptive, ses lignes vocales procurent des frissons comme en témoigne un 'Little Lonely' tout en force rentrée.

Sans doute pas du vrai progressif pour les puristes, Golden Caves baguenaude à la lisière du genre, artisan d'un rock atmosphérique où la richesse instrumentale est mise au service d'une bande son introspective dont "Dysergy" se veut l'écrin raffiné vibrant d'une mélancolie pulsative. (01.05.2020 | MW) ⍖⍖⍖


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