4 avril 2020

Strigoi | Abandon All Faith (2019)




Guitariste de Paradise Lost (est-il encore besoin de le rappeler ?), Greg Mackintosh possède un son et une écriture qui n'appartiennent qu'à lui, et qui rendent sa présence au sein d'un projet aisément identifiable. Prenez Strigoi et, par exemple, le titre 'Phantoms' qui, passée une courte intro, sert d'amorce à "Abandon All Faith", dès les accords de guitares, obsédants et échappés d'une mine de charbon, on reconnaît l'empreinte de l'Anglais, sinistre et charbonneuse. D'autant plus qu'il y donne libre cours à ses penchants les plus noirs, les plus mortifères. Ce que, nonobstant un (quasi) retour dans les profondeurs caverneuses du gothic doom death depuis plusieurs albums, Paradise Lost ne lui permet plus de réaliser. C'était là déjà une des raisons d'être de Vallenfyre, projet cathartique que Greg avait lancé suite au décès de son père, emporté par un cancer. Trois hosties plus tard, le guitariste a senti qu'il était temps de fermer ce chapitre extrêmement personnel de sa vie, mais la soif de sonorités pesantes, héritées des Bathory et autres Celtic Frost, n'était pas épanchée pour autant. D'où la mise en branle de Strigoi, né des cendres de Vallenfyre dont il récupère le bassiste live Chris Casket et, en tant que musicien de session, le Finlandais Waltteri Väyrynen, par ailleurs batteur actuel de Paradise Lost. D'une certaine manière, "Abandon All Faith" reprend les choses là où les a laissées "Fear Those Who Fear Him", le testament de Vallenfyre. Même son accordé plus bas que terre, mêmes remugles souterrains. L'album fore les crevasses intimes d'un death metal cendreux au visage écorché. Mais par rapport à son précédent projet, Strigoi dévoile un Mackintosh plus libre dans son expression d'une brutalité aussi sévère qu'hallucinée.




En rampant dans les entrailles de "Abandon All Faith", on comprend vite que le musicien ne s'est imposé aucune limite. Il trempe sa hampe d'un noir morbide aussi bien dans le crust presque punk ('Nocturnal Vermin' ou 'Throne Of Desigrace' qui crachent leur sauce fielleuse en moins de deux minutes) que dans la nasse bruitiste d'une friche industrielle (l'intro glaçante 'The Rising Horde'). Quant à 'Carved Into The skin', caveau d'un doom abyssal, il vient nous rappeler que l'homme n'a décidément de leçons à recevoir de personne lorsqu'il s'agit de peindre des territoires dévastés et lessivés par des pluies acides. Il en résulte un album varié qui oscille du matraquage en règle ('Parasite', 'Iniquitous Rage') à l'excavation lugubre ('Abandon All Faith'). Avec toujours en sus des lignes de guitares obsédantes taillées dans une noirceur minérale ('Plague Nation') et des vocalises aux allures de gorges profondes qui démontrent encore une fois que, si Mackintosh n'est sans doute pas un grand chanteur, il se révèle parfait pour vomir cette marée noire. N'oublions pas enfin de souligner la performance de Waltteri Väyrynen dont la frappe tentaculaire participe de la force démentielle qui brûle dans ce haut fourneau. Né des cendres de Vallenfyre, Strigoi ne déçoit pas, bâti sur le savoir-faire inoxydable du guitariste de Paradise Lost qui trouve là manière à cultiver son goût intact pour un death brutal et sinistre. (14.01.2020 | Music Waves)


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