A l'origine, projet artisanal, fruit d'un duo, celui que composent Fab Bernardin (batterie) et Alban Blaising (tout le reste et notamment ces artworks si personnels), Hercynia Silva tend depuis lors à muter en un véritable groupe. En recrutant tout d'abord le guitariste Didier Ducouloux puis le bassiste Olivier Richard (désormais remplacé par Stéphane Klespert) et surtout Pat Aubier du groupe de rock celtique NAC, au micro et dont l'embauche constitue sans aucun doute l'apport le plus significatif, Alban reconnaissant lui-même ne pas être un bon chanteur. Cette solide armature commande une partition plus organique sinon plus massive. Déjà sensible sur Le culte des forêts (2017), gravé sous la forme d'un trio, cette évolution se matérialise aujourd'hui par Les pierres sacrées, quatrième offrande qui voit ses auteurs à la fois progresser et accéder à une dimension inédite qui n'était encore qu'en gestation sur leurs deux premières traces discographiques. Si son identité tant musicale que thématique, demeure toujours aussi insaisissable, alliage forestier entre le post punk et le metal aux lueurs sombres voire martiales, un peu comme si Stille Volk se mettait au dark rock, on devine que Herynia Silva se nourrit de ce sang frais pour enfanter des compositions de plus en plus efficaces et charpentées qui s'éloignent du sentier des débuts où elles baguenaudaient, pour se faufiler au milieu d'une inquiétante cérémonie rituelle (Cardinal).
Déclamant ces textes empreints d'une poésie païenne et ombrageuse, Pat Aubier insuffle à ces nouvelles chansons une énergie bourrue, parfois agressive qui les rend plus mordantes encore que leurs devancières. Jumelées à ces accords de guitares obsédants aux allures de lanterne perçant l'obscurité d'un bois nocturne (Gévaudan), ses lignes vocales nous hypnotisent, à l'image du Temps est arrivé, tertre d'un gothic rock qui envoûte autant qu'il trouble grâce à des paroles désespérées évoquant un monde à l'agonie et une nature violée. De fait, Les pierres sacrées nous convie à une gigue frénétique et crépusculaire qui, sous couvert d'une ambiance échappée de temps reculés (Cernunnos) trouve une résonance en réalité toute contemporaine (Le diable violoneux). Drapé dans un suaire menaçant (La harde), le menu laboure un sol aux sillons profondément mélancoliques, témoin cette Grande clarté que ceint une poétique amertume. Devenu un véritable groupe sans sacrifier cette signature unique tavelée d'une liturgie païenne, Hercynia Silva gagne avec Les pierres sacrées une nouvelle envergure, continuant à façonner un art de plus en plus trépignant mais pétri d'une dureté pierreuse. (18.01.2020 | La Horde Noire)
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