Souvent inspiré par des événements, Jean-Pierre Mocky tire le sujet de Solo du contexte post-mai 68. Déçu, semble-t-il par cette révolution des temps modernes, le réalisateur retranscrit plutôt bien cette époque où la France est secouée par un souffle contestataire et parait alors à deux doigts de basculer dans le chaos entre les milices extrémistes, qu'elles soient de gauche ou de droite, qui s'affrontent dans le sang. Mais en 1969, si les conséquences au niveau sociétales sont amorcées, l'ordre est revenu et l'ordre des choses n'a pas (encore) été réellement bouleversé. Dans son film, Mocky raille autant la bourgeoisie qui se vautre dans une bauge décadente que ces étudiants qui rêvent de poursuivre la révolte, terroristes naïfs qui ne voient pas plus loin que le bout de leur nez.
Sous le vernis d'un polar noir à l'américaine, le metteur en scène égrène une sorte de road-movie francilien et nocturne. Au gré de ses rencontres et des morts semés sur la route, son personnage, d'un romantisme crépusculaire, se fait le porte-voix de ses désillusions avec une violence pourtant non dénuée d'une glaciale ironie. S'il ne cache pas son affection pour cette jeunesse contestataire, il la dépeint comme un maigre bataillon de soldats téléguidés par un idéal déjà bien érodé. Acteur limité, il est permis de penser que Mocky aurait dû laisser ce (beau) rôle à un comédien au jeu plus épais. Mais comme le héros de L'albatros (1971), il confère à ce Vincent Cabral une douceur désenchantée qui le rend attachant. Succès tant commercial que critique malgré un résultat inabouti, Solo s'inscrit dans la période la plus riche de son auteur qui le tourne entre La grande lessive (1968) et L'étalon (1970), tous deux avec Bourvil. La décennie suivante sera plus inégale pour le réalisateur mais il y a pourtant toujours quelque chose à sauver de ces pellicules parfois bordéliques au ton toujours très personnel. (vu le 25.03.2020)
De Jean-Pierre Mocky, avec Anne Deleuze...
De Jean-Pierre Mocky, avec Anne Deleuze...
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