30 mars 2020

ISON | Inner-Space (2019)




Draconian en hibernation depuis cinq ans, il existe heureusement ISON pour consoler tous les amoureux de son actuelle chanteuse Heike Langhans, dont la beauté n'a d'égale que le talent. Associée au Suédois Daniel Änghede, chanteur et guitariste de Crippled Black Phoenix, la belle trouve dans ce projet l'écrin idéal pour répandre tel un linceul évanescent sa voix cristalline dont la tessiture ouatée la rapproche du murmure funèbre. Deux offrandes, qui n'ont d’EP que le nom eu égard à leur (longue) durée et leur qualité respectives, ont fait plus qu'éveiller notre curiosité au sujet de ce duo que le titre 'Rivers Between Us', figurant sur "Sovran", dernier album en date de Draconian, avait déjà assemblé. Présenté comme leur premier opus officiel, "Inner-Space" se glisse dans le même couloir que "Cosmic Drone" (2015) et "Andromeda Skyline" (2017). Ceux qui ont très justement succombé aux charmes distillés par ces ébauches ne seront ni surpris ni déçus par un contenu en tout point conforme à ce que nous attendions de lui, réceptacle d'un doom plus spatial qu'atmosphérique. L'œuvre ne possède qu'un (relatif) défaut, elle démarre trop fort. Parfaite synthèse d'une musique aux allures de pastel stellaire, le morceau-titre brille d'un tel éclat, mélancolique et éthéré à la fois, qu'il ne permet pas au reste du menu de soutenir la comparaison. "Inner-Space" ne durerait que ces huit minutes, qu'il serait quand même indispensable, véritable gemme taillée dans une roche venue du fin fond de l'espace.



Si le couple que forme Heike avec Neige (Alcest), le temps d'un 'Radiance' pulsatif et orageux qui renouvelle la formule du duo conjugué au masculin et au féminin, accroche la mémoire, les pistes suivantes ne laissent tout d'abord qu'un vague souvenir, celui d'une resucée, au demeurant toujours aussi magique, de la piste éponyme. Mais à l'image de l'identité si particulière - et donc si précieuse - de ses créateurs, ces chansons ne se dévoilent que par petites touches pointillistes. Dans les replis de leur trou noir vibre leur intimité, insaisissable, presque vaporeuse. Jamais le trait n'est appuyé, laissant le pinceau spectral de la Sud-Africaine nous bercer à la manière d'une douce mais funeste mélopée. Les tentatives de durcir le ton ('Equals') sont vite avortées, avalées par un vortex fantomatique. Couchée sur un lit électronique ('ISAE') ou hypnotique ('The Fifth World', que nimbent de lointaines effluves drone), la belle recouvre entièrement l'album d'un dôme nébuleux. Ses lignes vocales agissent comme la plainte de sirènes guidant l'auditeur dans un univers étrange coincé entre plusieurs dimensions ('Everything's About To Change Forever'). Le bruissement de sa voix suffit à exprimer une tristesse immense. La batterie semble être gommée, la guitare, réduite à des accords squelettiques au profit d'un tapis d'ambiances cosmiques que sème Daniel Änghede. Seul 'A Golden Force' n'embarque pas la chanteuse, pour un résultat du coup moins notable. Trop long certainement, répétitif peut-être, "Inner-Space" n'en demeure pas moins séduisant, vol (in)habité dans des contrées reculées et inaccessibles, parfaitement révélateur d'une personnalité unique qui allie la léthargie du doom et l'errance soyeuse du rock atmosphérique, le tout auréolé  d'un suaire spatial. De toute façon, comment résister à la douceur vocale de Heike Langhans qui confère à ces compositions un aspect quasi immatériel. Son timbre a quelque chose d'un halo limpide et ensorcelant, pâle lumière venue des abîmes de la galaxie, qui nous caresse avant de nous endormir pour un sommeil éternel... (01.02.2020 | Music Waves)

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