31 janvier 2020

Anges de la mort | S/T (2019)




On peut toujours faire confiance à Monarque pour tamiser la froide terre québécoise et y déceler les gemmes précieux d'un art noir authentiquement pur, étanche aux modes, résistant aux corruptions extérieures. Deux ans après avoir vu la nuit, Anges de la Mort trouve ainsi un refuge taillé pour lui dans ses Productions Hérétiques dont il vient enrichir l'admirable catalogue avec son EP éponyme et séminal. Publié en format cassette, l'objet dévide quatre pistes, réparties équitablement entre chacune des deux faces. Moins de dix-huit minutes, c'est peu et pourtant largement suffisant pour se faire une idée précise du style pratiqué par ce jeune pousse et d'un potentiel dont on devine que cette offrande ne fait que le déflorer. Emergeant d'une sente boisée et tapissée de neige, ce black metal déroule une trame acérée dont les mélodies implacables ne grèvent en rien la glaciale efficience.  Ishkar (batterie) et Borvos (tout le reste) font souffler le blizzard du Immortal des années 90 avec lequel ils partagent une habileté furieuse à peindre des paysages sinistres et tenaces. Directs et aiguisés, ces titres vont à l'essentiel dans la belle tradition scandinave. De la Norvège, Anges de la Mort puise son âpreté hivernale et de la Suède, ce goût pour des riffs nocturnes et bouillonnants qui glacent le sang de compos torrentielles. Le chant dans la langue de Molière affirme une identité inscrite dans cette forteresse francophone. Ajoutons à cela de superbes idées et vous obtenez un galop d'essai pour le moins prometteur. Fielleux et sans afféteries, Anges de la Mort en écarte les cuisses, saillie imparable dont les morsures ont le tranchant d'un scalpel. Alliant vélocité et mélodies rageuses, Mangeurs de cadavres suinte la mort par tous les pores, creusant dans le sol un charnier percé de lourdes crevasses. Quant à Crève le Léviathan, de déchirantes lignes de guitare le lacèrent, faisant jaillir de ses entrailles une beauté dramatique. De nobles arpèges forestiers ferment ce caveau neigeux avec le squelettique Ode aux esprits vivants, d'une merveilleuse épure. Le tandem québécois signe quatre premiers titres riches de promesses, tertre d'un art noir éternel, agressif et entêtant dont on guettera la suite avec une grande impatience. (30.11.2019 | LHN) ⍖⍖⍖



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