20 septembre 2009

KröniK | Porcupine Tree - The Incident (2009)




Pour Steven Wilson, chaque disque est une oeuvre à part entière qui suit une trame définie, avec un début et une fin. Chaque titre ne peut y être remplacé par un autre. Cette vision s'oppose bien entendu à celle en vigueur dans la pop et dans la variété où très souvent les albums ne sont qu'un agrégat de chansons disparates. On ne saurait trouver meilleur preuve de cette affirmation dans que The Incident, certainement une des sorties les plus attendues de cette année. Comme chacun le sait, il ne s'agit pas seulement d'un concept-album, exercice que Wilson affectionne beaucoup, mais surtout d'une seule et unique pièce subdivisée en quatorze parties cependant que sur un second disque sont réunies quatre autres pistes indépendantes. Face à un menu aussi foisonnant, il est difficile de se faire une opinion rapide. De fait, The Incident est un ensemble peu accessible et le sera encore davantage pour ceux (nombreux) qui ont découvert le groupe avec Fear Of A Blank Planet par exemple. Car si depuis In Absentia, Porcupine Tree, suivant la volonté de son leader, fait plus que braconner sur les terres du metal, ce nouvel opus rompt avec cette évolution. Certes, des compositions telles que "The Blind House" ou "Circle Of Manias arborent une facette assez musclée mais la plupart du temps, c'est une plastique plus feutrée riche en retenue ("Kneel And Disconnect") que Wilson a préféré choisir pour élaborer une de ses créations les plus personnelles, les plus autobiographiques (il suffit d'écouter les paroles de "Time Flies" pour s'en rendre compte) quand bien même on relève de-ci de-là, quelques détails, quelques oripeaux de cette récente direction musicale ("The Incident"). Mais n'espérez pas y trouver des montée puissance monstrueuse de l'acabit de "Anesthetize" ou "Arriving Somewhere But Not Here". N'allez pas croire cependant que Steven Wilson regarde dans le rétroviseur de son passé (ce n'est pas son genre), il a seulement adopté la voie qui correspondait le mieux au fil conducteur de cet album, une voie plus expérimentale, plus progressive aussi. 

Ainsi, celui-ci, alternant plages très courtes et vrais morceaux, pourra peut-être paraître décevant de prime abord, vierges de véritables morceaux bravoure. Il y en a pourtant de nombreux. The Incident ne doit donc pas être appréhendé par miettes mais comme un tout. Car c'est aussi grâce à ces nombreuses petites pistes, fourmillant de richesses ("The Yellow Windows Of The...") qui les encadrent que des titres telles que "The Blind House", "Drawing The Line" ou le floydien "Time Flies" prennent toute leur valeur. Ecouter cette oeuvre par petits bout serait comme tenter d'apprivoiser Dark Side Of The Moon (toute proportion gardée, bien entendu) dans le désordre. Absurde ! Plus proche donc de The Sky Moves Sideways ou de Signify que de Fear Of The Blank Planet, dont il se rapproche pourtant par ce souci désormais de la part du groupe de faire ce qui lui chante, de ne plus s'escrimer à décrocher un hit, un passage en radio, The Incident est comme un édifice dont le sens nous apparaît qu'une fois sa totalité observée. Car c'est uniquement une fois cette totalité cernée que la beauté, la puissance d'évocation et la richesse de cet opus se font jour. Alternant pulsations sombres ("The Incident", "Degree Zero Of Liberty"), perles diaphanes et bouleversantes ("Octane Twisted", "I Drive The Hearse"), respiration hypnotique ("Drawing The Line" dont certains passages ne sont pas sans évoquer No-Man), voyage eu relief accidenté entrecoupé d'un kaléidoscope d'ambiances crimsonienne ("Time Flies"), cet album est de ceux qu'une vie entière se suffira jamais à en faire le tour, à en déceler tous les secrets. On ne saurait enfin minimiser le second disque qui séduira sans doute davantage les amateurs de sonorités metal ("Flicker" et surtout le démentiel "Bonnie The Cat", un des meilleurs titres du lot). Plus intimiste (et anecdotique) est "The Black Dalhia" tandis que "Remember Me Lover" oscille entre calme et déchaînement. Porcupine Tree signe là certainement une de ses plus belles - et plus ardues -réussites, une des plus sombres et désenchantées également. Parfaitement produit et interprété (comment pourrait-il en être autrement), certains jugeront que The Incident n'apporte rien de neuf. A vous de jugez... Dans tous les cas, il ne laissera personne indifférent. (2009) ⍖⍖⍖


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