8 février 2016

With The Dead | With The Dead (2015)


Si, entre Death Penalty et Lucifer, son ancien compère, le guitariste Gaz Jennings, n'a pas chômé depuis le sabordage programmé de Cathedral il y a deux ans, Lee Dorrian s'est quant à lui montré plus discret. Nous étions nombreux à guetter des nouvelles. Le chanteur allait-il prendre sa retraite ? Se contenterait-il de gérer son label Rise Above ? Ou bien, et c'est ce que tout le monde espérait, participerait-il à un nouveau projet ?  La réponse dépasse en fait nos attentes car ce n'est pas seulement un groupe de plus qui marque le retour de l'Anglais mais une sorte de Graal pour tous les fidèles du UK doom car, manière de super-groupe, With The Dead est le fruit fantasmé de sa copulation avec l'ancienne section rythmique d'Electric Wizard, composée, est-il besoin de le rappeler, de Tim Bagshaw (basse) et Mark Greening (batterie). Il était de toute façon écrit que ces trois collaboreraient un jour ou l'autre. L'acte de naissance du trio est-il pour autant à la hauteur des espoirs suscités par cette union ? Sans surprise, cette hostie séminale et éponyme trempe dans le jus occulte d'un doom ultra massif. Comment pouvait-il en être autrement avec la paire Bagshaw / Greening dont le jeu est reconnaissable entre mille ? Guitare corrosive, basse accordée plus bas que terre et percussions comme des rouleaux qui s'écrasent contre une falaise, ancrent de facto la musique de With The Dead dans un lourd substrat granitique. Ramesses, le groupe des deux complices, n'est naturellement pas très loin. Nul ne s'en plaindra car pouvoir savourer la performance animale de Mark derrière ses fûts tient de l'orgasme immédiat ('The Cross'). Bien sûr, Dorrian, avec son timbre lui aussi aisément identifiable, évoque le spectre de Cathedral. Certains riffs participent d'ailleurs de cette filiation, comme l'illustre l'intro de 'Nephthys', quand bien même Tim possède une patte différente de celle de Gaz Jennings, moins sabbathienne et plus brutale. Pourtant, davantage qu'avec le père de "The Carnival Bizarre", cet opus noue surtout des liens avec Teeth of Lions Rule The Divine, side-project éphémère du chanteur dont le "Rampton" reste encore aujourd'hui un des albums les plus pachydermiques jamais entendus.  De fait, cela faisait longtemps que la voix unique de Lee n'avait pas été associée à une masse sonore aussi plombée. Et surtout oppressante, viciée, témoin 'Screams From My Own Grave', procession terminale aussi interminable que douloureuse qui confine à une forme de transe mortifère. On sent dans cette lourdeur jusqu'au-boutiste l'empreinte des ex-Electric Wizard qui plongent cette hostie dans les profondeurs de l'indicible.  Il en résulte un bloc pétrifié aux allures d'enclume dont les six pulsations sont comme des plaques tectoniques qui se chevauchent. Aucune lumière ni un quelconque signe d'espoir à en attendre, véritable descente spéléologique au fond d'un abîme sans fin. Vierge de tout artifice qui aurait pu en polir la surface, "With The Dead" est une œuvre définitive dans son refus de toute beauté, extrême dans son expression d'un doom evil et cauchemardesque (l'énorme 'Living With The Dead'), course en avant vers une issue qu'on devine (forcément) funeste. A tel point qu'il est permis de se demander comment le trio pourra survivre à ce premier signe de mort plus que de vie. S'enfoncer plus encore dans les tréfonds semble presque impossible ... (2015)


                                     

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