Nonobstant
les qualités de ses deux dernières offrandes, "Vîrstele pămîntului"
et dans une moindre mesure, "Tău", publiées respectivement en 2010 et
2015, force est pourtant d'admettre que Negură Bunget ne s'est jamais vraiment
remis du départ en 2009 de Hupogrammos et Sol Faur qui en incarnaient
l'incontestable âme, avec Negru, dernier membre historique à tenir ses
rênes. Si avec Dordeduh, le projet
qu'ils ont fondé par la suite, les deux démissionnaires n'ont pas encore réussi
à enfanter d'un album aussi brillant que "Om", quatrième escapade de
leur ancien port d'attache dont on peut penser qu'il restera à jamais leur chef-d'oeuvre,
"Mozaic", essai séminal de Sunset In The 12th House, leur deuxième
progéniture née après leur départ, devrait par contre trôner parmi leurs plus
belles créations. Formé en 2011 autour de tous les membres de Dordeduh, cela
faisait donc longtemps que nous attendions le premier signe de vie de ce groupe
mystérieux. De son énigmatique visuel à son titre qui résonne comme la promesse
d'un voyage diverifié et coloré, cet opus porte l'évidente griffe de ses
auteurs, fidèles à un art mystique et terreux, quand bien même il n'arpente pas
les mêmes terres noires, encore qu'il partage avec ses aînés une approche
sombrement folklorique et tribale identique, témoin ce 'Desert's Eschaton',
constellé de teintes orientales, périple pulsatif d'une envoûtante beauté qui
n'est parfois pas sans évoquer Orphaned Land. Bien qu'un socle lourd affleure
parfois, lors de certains passages zébrant 'Paraphernalia Of Sublimation', par
ailleurs l'un des titres les plus progressifs du lot, "Mozaic"
déambule à travers un vaste espace atmosphérique aux confins d'un post-rock
forestier dont il épouse la forme uniquement instrumentale et le goût pour les
pistes aux dimensions étirées. Du haut de ses six titres en près d'une heure de
musique (presque) vierge de chant (quelques vocalises se font entendre par
moments), l'ensemble aurait pu aisément sombrer dans l'ennui. Ce n'est bien
entendu pas le cas, grâce au talent de ces musiciens habités et plus inspirés
que jamais, (re)trouvant même dans ce substrat évolutif le souffle épique et
cette sève chamanique évaporés depuis presque dix ans. Curieusement, le menu
s'ouvre sur deux sentinelles oscillant entre dix et quinze minutes, œuvres
monumentales aux racines à la fois noueuses et pleines d'une majesté séculaire.
Si la première, 'Seven Insignia' a des allures d'expédition traversée de
multiples ambiances, 'Arctic Cascades' se veut plus légère, guidée par des
lignes squelettiques qui se muent en sustain vaporeux. Tout aussi curieusement,
l'écoute s'achève sur deux morceaux (relativement) plus courts et très
différents l'un de l'autre, lesquels ne sont d'ailleurs pas les plus réussis,
brisant un peu l'intensité émotionnelle qui régnait jusque-là. Il s'agit tout
d'abord de 'Ethereal Consonance', lente élévation que hantent des chœurs masculins,
puis c'est au tour de 'Rejuvenation', conclusion qui étonne par sa dureté de
traits. Amputé de ces deux morceaux, au demeurant de bonne facture,
"Mozaic" aurait été un chef-d'œuvre, ce qu'il n'est donc pas mais de
peu. Reste au final un joyau noir et ce que Hupogrammos et Sol Faur ont créé de
plus fort depuis le "Om" de Negură Bunget. Ils transcendent le post
rock pour accoucher au final d'un édifice qui n'appartient qu'à eux, aussi
tribal que boisé. (2015)
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