Parallèle évident avec la figure spectrale ornant
celle de Bitter Ist's Dem Tod Zu Dienen, cette silhouette naufragée errant
seule sur le très beau visuel habillant Flammentriebe est un signe qui ne
trompe pas : Dornenreich a décidé de renouer avec une forme de Black Metal
plus agressive. Depuis Durch Den Traum, les Autrichiens avaient peu à peu
quitté les rivages noirs de leurs débuts pour accoster une terre de plus en
plus atmosphérique, incorporant des éléments acoustiques et folkloriques. Avec
le recul, le dépouillé In Luft Geritzt apparaît aujourd’hui comme
l’aboutissement de cette démarche artistique. Ainsi, contre toute attente et
alors que nous nous attendions à ce que ce septième opuscule suive une
trajectoire voisine, l’hydre à deux têtes, rejoint – c’est une bonne nouvelle –
par leur ancien batteur, Gilvan, livre avec Flammentriebe ni plus ni moins que le disque sinon le plus violent au
moins le plus sombre du groupe depuis des lustres ! Cette dureté
retrouvée, parfaitement mise en valeur par le travail sonore du fidèle Markus
Stock (Empyrium, mais est-il encore besoin de la préciser ?) s’exprime par
le prisme de paroles volontairement agressives et que renforce la diction
martiale de Eviga. Pour autant, nous avons affaire à des artistes (le mot n’est
pas trop fort), des vrais, trop intelligents pour se contenter d’un simple coup
d’œil dans le rétroviseur. De fait, Flammentriebe n’est en aucun cas un effort
nostalgique, celui-ci se veut plutôt une
synthèse de l’art des Autrichiens et de son évolution. Il s’agit d’une œuvre-somme
où s’accouplent les aplats tranchants d’un Black Metal qui ne ressemble à nul autre et les traits osseux dessinés par un violon aux accents mélancoliques.
Basé sur huit compositions intenses et désespérées, l’album suit un tracé qui
le voit débuter dans la brutalité la plus noire avec
« Flammenmensch » et s’achever sur une note plus posée, avec
« Erst Deine Träne Lôscht Brand », longue plainte instrumentale minimaliste aux teintes grêles, manière de
conférer à l’album une lumière salvatrice bien que pale après ce torrent de
négativité, quand bien même les ultimes mesures électriques viennent nuancer
cette impression. Flammentriebe est à la croisée de ses prédécesseurs et ce
faisant il s’impose peut-être même comme la création autant musicale que
philosophique idéale de la part d’une entité dont la singularité jamais
démentie fait plaisir à voir et à entendre à une époque où règnent le
conformisme et la standardisation culturelle. Ouvre-t-il un nouveau chapitre
dans la carrière du groupe ou bien n’est-il qu’une parenthèse ? L’avenir
nous le dira… (2011)
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