Si son nom peut faire sourire, pour qui connaît
l'histoire romaine, Brutus ne plaisante pourtant pas vraiment, auteur d'emblée
d'un premier jet plus proche du sans-fautes que du brouillon que sa jeunesse
pouvait laisser craindre de prime abord (ou pas). Sa pochette colorée et donc
bien psyché sur les bords annonce un énième album de Stoner Rock nourri aux
grains des seventies, scandinave de préférence, Svart Records oblige, Behind
The Mountains n'est pourtant l'oeuvre ni de Suédois ni de Finlandais mais de
Norvégiens, ce qui est plus surprenant, le revival Heavy Rock ayant davantage
pour épicentre ses deux voisins septentrionaux que la terre noire du Black
Metal ! Ne serait-ce - peut-être - cette inspiration granitique vaguement
décelable dans le titre de l'album, rien ne saurait toutefois distinguer
Brutus, qu'il ne faut pas confondre avec son presque homonyme Bretus, des
Horisont et autre Troubled Horse qui pullulent actuellement, faisant le bonheur
des nostalgiques de cette vibe '70, de cette patine chaude et ruisselante de
feeling comme une chatte après d'habiles préliminaires. Chant voilé qui sent
autant sous les bras que la bière, guitare bluesy mais accérée façon Ritchie
Blackmore (écouter le solo perforant "Personal Riot" et vous
comprendrez !), rythmique pépère bien que dégorgeant de groove : telle est la
recette, immuable, mais O combien savoureuse. Et dont on ne se lasse pas !
Surtout quand elle mijote avec un tel talent, une telle aisance. Les
principales différences entre tous ces groupes nous inondant les pavillons
résident finalement dans la dose de blues qu'ils injectent à leurs compos et
dans une influence qui hésite entre le Black Sabbath originel et Deep Purple.
Quoiqu'ils en disent, les Norvégiens lorgnent vers davantage vers le second.
C'est très bien. Précédé par le single
Personal Riot, Behind The Mountains éclabousse d'effluves psyché, cr ache un jet bluesy typique du proto-hard rock
de la fin des années 60 ("Crystal Parot"). De fait, Brutus, malgré
son nom, mise moins sur la puissance que la rondeur velouté d'une musique
accrocheuse dont l'apparente simplicité cache en réalité une écriture au
cordeau, riche d'ambiances duveteuses. Le temps du lent et lourd
"Reflections", voyage nappé d'orgue Hammond aux multiples aplats, le
groupe trempe son pinceau dans des teintes plus sombres qui lui réussissent
bien, jusqu'aux dernières mesures où la cadence s'emballe en un final aux
couleurs d'un pourpre profond délicieux. Chaque titre a des allures d'hymnes,
de "The Witches Remains", amorce imparable à "Can't Help
Wondering Why", perle bigarrée elle aussi source de solis enlevés gorgés
de ce feeling à Johnny Winter. Encore un excellent groupe de la part d'un style
dont on a l'impression qu'il ne peut totalement décevoir... (2013)
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