2 juin 2014

Krönik | Ethereal Riffian - Aeonian (2014)




Est-ce son nom, à priori antinomique évoquant une espèce de lourdeur éthérée ? Est-ce son origine géographique, l'Ukraine, terre davantage connue pour ses temples impies que pour ses autels en l'honneur de la déesse Doom ? Est-ce enfin le visuel aussi coloré qu'énigmatique de sa seconde offrande, sujet de cette chronique ? C'est sans doute un peu de tout cela qui fait qu'au moment de pénétrer l'intimité de Ethereal Riffian, la certitude d'être bientôt  happé par un maelstrom inédit à des années-lumière du trip stoner habituel s'incruste dans l'esprit. L'écoute de "Aeonian" nous donnera raison. Forcément. De loin pourtant, la musique qui s'en répand, dynamique et massive à la fois, fait éclore des images du passé, celles de Karma To Burn pour cette force organique qui emporte tout tels les rouleaux d'une tempête, et de Blindeadpour ce son sans afféterie propre à la scène d'Europe de l'Est. Mais déjà, il y a ces structures étirées de plus de 10 minutes en moyenne, ce chant un peu monotone presque en second plan qui confère à l'ensemble des allures de bloc instrumental, autant de détails qui viennent parasiter ces premières impressions. Car de près, "Aeonian" se veut tout autre, magma aussi singulier qu'indescriptible qui ne doit finalement rien à personne. Le groupe ne cache pas ses intentions, à savoir composer une musique originale et peu conventionnelle, invitation à un voyage introspectif vers une réalité autre. Plutôt que de le qualifier de progressif, nous préférons parler à son endroit d'un Doom évolutif en cela qu'il s'ouvre sur un espace épique à la complexe stratification. Si la rythmique, terreuse et énergique, l'arrime à un socle extrêmement lourd ('March Of Spiritu'), l'art des Ukrainiens, se pare aussi d'une dimension presque atmosphérique, propulseur halluciné vers de mystérieuses sphères célestes, ambivalence que résume parfaitement un titre tel que 'Wakan Tanka', long et foisonnant derelict oscillant avec une puissance larvée entre aplats heavy et envolées aériennes dont les pinceaux sont ces guitares fuselées et stratosphériques qui tissent une véritable toile vers un Absolu orgasmique. Etonnamment, ces pulsations vibrent d'une tension qui jamais n'explose réellement, comme si le groupe cherchait à repousser au maximum et trop tard le moment de la jouissance. Celle-ci est pourtant là, on peut la ressentir durant chaque instant de cet album gigantesque dont l'apothéose s'incarne à travers  le terminal 'Anatman', où se mêlent effluves floydiennes, beauté percussive, flute pastorale, riffs tendu comme le foc d'un navire et soli virtuoses gonflés d'une sève rêveuse, jusqu'à une décélération hypnotique qui meurt peu à peu au son d'une batterie délicate, noyée sous un nuage d'effets cotonneux. Avec cette seconde offrande aussi étonnante que maîtrisée, Ethereal Riffian conjugue puissance plombée et envolées progressive au moyen de quatre pulsations à l'architecture dynamique. (cT14)


Progressive Stoner Doom | 42:58 | Tartarus Records | FB



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