18 février 2014

Chronique : Tortorum - Katabasis (2014)




Quand bien même l'âge d'or du Black metal norvégien est aujourd'hui révolu, la chapelle y reste vivace, peuplée de fidèles attirés par de nouvelles générations de prêtres impies qui, reconnaissons-le, déçoivent très rarement. TORTORUM fait donc partie de ces jeunes pousses nourris aux grains noirs. Bien qu'auréolée d'une aura flatteuse, cette scène n'en demeure pas moins relativement réduite, expliquant pourquoi ses membres ne cessent de se promener d'un groupe à l'autre, mercenaires chevronnés au pedigree qui force le respect. Basé à Bergen, ville O combien légendaire pour le Black Metal, le sujet de cette chronique ne déroge de fait pas  à cette règle puisque ses deux guitaristes se sont activés aussi bien chez GORGOROTH ou VELES (pour Skyggen) que chez VULTURE INDUSTRIES ou AETERNUS (pour Specter). De renommée certes modestes, les gars ont donc du métier et l'assurance de briscards qui connaissent toutes les ficelles du genre. Et cela s'entend tout du long de ce Katabasis de haute volée, seconde offrande qui fait suite à un Extinctionist déjà de bonne mémoire. Norvégien de sol, on sent pourtant qu'un peu de sang suédois coule dans les veines de TORTORUM. Il y a cette croûte sonore qui ne trompe pas, émanations des Necromorbus Studios, l'antre de WATAIN avec lequel le groupe partage le producteur Gunnar. Ce sens du malsain de la démesure vicieuse également, qualités d'une sinistre efficacité qui le rapproche de formations telles que VALKYRJA ou ONDSKAPT. De sa terre d'origine, l'entité conserve néanmoins  un goût prononcé pour les mid-tempos reptiliens, forteresses minérales qui se dressent dans la nuit froide d'un hiver éternel. Bref, à sa manière, mortifère et tendue comme une verge turgescente, Katabasis est une leçon où s'additionnent tout ce pourquoi on aime tant le pur Black Metal. Guitares grésillantes pulsant d'un stupre morbide, atmosphères aussi corrompues que crépusculaires, mélodies tranchantes, noircissent de leurs traits abruptes un cahier des charges honoré avec une maîtrise éblouissante. Passée une amorce instrumentale qui ne s'imposait pas, l'écoute se sépare en deux temps. Le premier agglomère les titres les plus agressifs ("Severance And Perseverance"), les plus véloces aussi ("As The Light Falls To Slaughter"), saillies toutefois toujours fissurées par des riffs maladifs suintant une négativité sale et nerveuse, témoin "In Nameless Nonbeing" que déchirent des stigmates obsédants. Plus l'opus avance plus il gagne en intensité, culminant lors d'une seconde partie terrifiante secouées par des pulsations plus longues sinon plus travaillées, orgasme douloureux qui débute avec le puissant "Open Wide The Gates Of Chaos" lequel, après avoir tout arraché sur son passage s'achève sur un final pétrifié et désespérée dans sa sombre beauté. Avec son introduction sécrétatoire d'un mal-être absolu, "Attributions To The Dead" poursuit cette ténébreuse jouissance, préparant l'éjaculation terminale longue de près de 10 minutes qui justifient à elle seule autant l'existence de cet album que son indispensable acquisition. "Beyond The Earth And Air And Sun", que recouvre l'ombre de FARSOT et son monumental "Trauer", déroule une architecture toute aussi démentielle, envolée grondant d'une force cryptique que sillonnent des guitares aux allures de funestes vigies, propulsée par une rythmique qui phagocyte l'espace. Grandiose et donnant des frissons, sa conclusion vous hantera longtemps après que l'écoute se soit terminée. D'une puissance noire comme l'ébène,Katabasis est un très grand disque de Black Metal. (La Horde Noire 2014)

Genre Black Metal
Label World Terror Committee
Durée 52:17




Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire