29 janvier 2012

Helrunar | Sól (2011)


Nonobstant les qualités réelles de Frostnacht et Baldr Ok Iss , ses deux premières offrandes, il faut bien reconnaître qu’on n'attendait pas Helrunar à un tel niveau de réussite et d’ambition. Sól, une fois introduit (doublement, nous en reparlerons) dans la chaîne hi-fi, c’est un Pagan Black Metal froid et sévère qui aurait dû s’en échapper. Or il s’agit de bien plus que cela. Certes, les caractères mentionnés, cette froideur tranchante ainsi que cette sévérité, drapent toujours la musique des Allemands désormais limité à un duo et dont on identifie immédiatement l’écriture et une muse nordique inchangée. Mais, fort d’une inspiration sans limite, ils accèdent à une dimension inédite et ce faisant, ils confèrent au genre une lecture plus mature. Encore une fois propulsé par une prise de son âpre, brute, très peu policée du fidèle Markus Stock (Empyrium, The Vision Bleak), producteur maison du label Prophecy, Sól se déploie donc sous la forme d’un double album axé sur le concept du soleil nordique. Il serait tentant de limiter ce troisième essai à la simple ambivalence entre la chaleur et le froid ; ce concept bi-polaire l’entraîne en réalisé bien plus loin. De fait, bien que baignant dans une ambiance nappée d’une brume noire, il s’agit d’une œuvre d’une ampleur quasi philosophique écartelée entre le jour et la nuit, la vie et la mort. La division en deux pans distincts pourraient déterminer les deux visages de cet album avec d’une part un premier volet assez cru et Black Metal, et de l’autre, un second plus évolutif et atmosphérique. Pour pertinente qu’elle soit, cette description ne rend pas tout à fait hommage à une architecture homogène et complémentaire où plusieurs pistes instrumentales d’où jaillit une beauté désespérée ("Nur Fragmente", "Praeludium Eclipsis") encadrent des compositions plus longues que cisaillent des riffs grésillants et recouverts d’une gangue de glace. Après une introduction, le premier disque (Der Dorn Im Nebel) démarre avec "Kollapsar", dont l’ouverture, brutale nous plonge de suite dans une nuit noire éternelle. Lui succèdent deux lentes et lourdes traversées à travers des paysages gris et austères, "Unter Dem Gletscher" et "Nebelspinne" qu’entament à chaque fois de longues mises en place aux couleurs mélancoliques. Plus rapides, "Tiefer als der tag", que déchirent toutefois des passages plus pesants et "Ende 1.3" n’en sont pas pour autant vierges de ce désespoir hivernal et émotionnel qui court tout du long de cet album. Le second disque agglomère plusieurs complaintes plus crépusculaires encore qui permettent à Helrunar de poursuivre son travail. Les deux musiciens, aidés d’un guitariste de session, y sculptent dans la roche froide un Black Metal épique et extrêmement dur, parfois aux confins du Doom ("Rattenkönig"). Sól y atteint son Valhalla lors des onze minutes de la plage éponyme et terminale, laquelle meurt sur une seconde partie instrumentale, longue envolée égrenée par des lignes de guitares belles à en pleurer au point de vous donner des frissons. Comment le groupe est parvenu accoucher d’une telle beauté, d’un tel sommet d’émotion ? Nul ne le sait. Sol a quelque chose d’un paysage enténébré par une éclipse, entre ombre tragique et lumière frissonnante. Helrunar réussira-t-il à faire mieux ? (2011)


                                     

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire