14 février 2010

KröniK | Nahar - La fascination du pire (2009)




Sinistre. Il n'existe sans doute pas un terme plus approprié pour définir La fascination du pire. Nahar. Un nom symbolisant l'union de deux âmes tourmentées : Shaddar et Sorghal, chanteur de Nehemah. Si le projet a vu la nuit il y a dix ans maintenant, cette oeuvre est pourtant sa première, à l'exception, notable certes, de d'une demo (Soulscape) et d'un EP (A Moment Of Dead Emotions). C'est dire si elle était attendue comme un Graal ténébreux. Sinistre, effectivement. Dès le prologue «  In Red Light Perdition », un décor austère, aride s’installe. Gris. Nahar forge une vision du black, metal orthodoxe qu’aucune lumière ne vient jamais éclairer ni réchauffer. Minimaliste, cet art noir rampe au milieu de caveaux humides. L’atmosphère est cryptique et étouffante, drapée dans une production sèche comme un vagin avant des préliminaires. Le cadre installé, Nahar pollue l’auditeur à partir de l’obsédant « Face Of extinction », gangrène lancinante guidé par le chant sépulcral de Sorghal et par ses riffs qui vrillent les chairs. Les émanations négatives peuvent s’y déployer grâce à une durée qui dépasse les huit minutes ; elles étendent leurs ramifications tentaculaires, avalent l’espace d’une manière vertigineuse. 

Suicidaire, ces plaintes ne sombrent par pour autant dans une léthargie somnolente. « Where Others Have Drowned » et son tempo hypnotique, le démontre bien, tout comme le (presque) rapide « Defert Of Redemptpion », encadré par les martèlements d’une batterie métronomique tandis que des chœurs lointains étendent un linceul spectral. Le duo aime les cassures, les fissures qui déchirent une trame moins linéaire qu’il n’y parait. Tout est dans les ambiances mortuaires d’où sourde une folie prolifératrice. « Millenium’s Echo » est ainsi une dérive dans les arcanes d’un asile d’aliénés. Plus le disque progresse plus ses ambiances se noircissent encore davantage pour finalement accéder à une forme de laideur admirable avec « The March of No Reason » et cette ghost track cauchemardesque, souffle nihiliste qui entraîne l’album dans une mort granuleuse. Les voix sonnent comme un appel des limbes. La fascination du pire n’est pas une œuvre aisée d’accès car elle est vierge de signe de vie. Froide comme un cadavre, elle possède cette faculté rare de plonger une belle journée dans un tourbillon malsain et sordide qui laisse une trainée amer. On n’éprouve pas grand plaisir à l’écouter… et pourtant, on y retourne, attiré, à l’instar de ces accidents de la route, par une fascination morbide. (2010) ⍖⍖⍖


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