Injustement méconnu, Betray-Ed fait partie de ces projets qui semblent ne pouvoir prospérer que dans la pénombre, bien loin de l'agitation et de la fureur. Son âme, François, que ce soit avec Angellore ou bien Twilight Alliance, érige sans bruit, pierre par pierre et d'année en année, un édifice qui, s'il sent bon l'artisanat, n'en est pas pour autant inintéressant. Bien au contraire. Betray-Ed se veut en quelque sorte son jardin secret. S’il en a poussé la porte pour la première fois en 1996, ce n’est en réalité que depuis 2004, date à laquelle il a été rejoint par un guitariste, David, avec lequel il travaille en pointillé, qu’un nombre incalculable de réalisations essentiellement instrumentales ont vu le jour au confluent de plusieurs chapelles : folk, neofolk pastoral proche du Empyrium après sa mue, sans oublier une touche dark et atmosphérique. Le résultat pourrait paraitre hétéroclite. Pourtant, il n'en finalement rien tant ces influences fusionnent en un tout cohérent avec une fluidité certaine. De même le caractère bricolé, « fait à la maison », de l’ensemble ne grève étonnement pas la beauté et la profondeur de cette musique.
Car contrairement à d'autres genres chez lesquels une prise de son faiblarde peut s'avérer fâcheux, ces volutes minimalistes ne souffrent jamais d' une enveloppe sonore simple. Mieux, à l'instar du doom, cela leur confère un supplément d’âme. An Everlasting Drift illustre cette combinaison magique entre poésie folklorique et paysages mélancoliques. Plus proche de When Nostalgia Embraces My Soul que de Haunting Memories, cette offrande est un recueil de complaintes aux lignes épurées, presque insaisissables. Vierges de chant (Sauf sur "A Scent Of Forlon Love" et "Rising Midwinter Veils"), les ambiances sont distillées comme un pastel par des guitares acoustiques ou plus saturées, par des claviers aux atours presque funéraires, cependant que "HymnsFrom Cleitech" voit le maître des lieux s‘essayer à la flute de pan. Grâce à cette prise de son dépouillée (l‘album a été enregistré quasiment en une seule semaine), les instruments secrètent une tristesse cotonneuse. Oeuvre pleine de finesse qui respire la nature, An Everlasting Drift a quelque chose d'une déambulation onirique, d'un poème automnal dont les vers prennent la forme de morceaux aux confins de l'étrange qui évoquent les peintures romantiques allemandes du XIX siècle. (2010) ⍖⍖⍖
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