Ce sixième crachat longue durée de Nargaroth débute de la pire des façons. Après un prologue narratif avec cet accent germanique si séduisant, plutôt inspiré, déboule "Frühling" et son riff d'ouverture digne d'une fête de la bière allemande ! Mauvaise faute de goût ou provocation ? On ne saurait dire. Heureusement, bien vite, Kanwulf redevient lui-même et mouline un black metal selon son coeur, à la fois ultra répétitif et furieusement accrocheur. Plus proche de Geliebte des Regens que de Semper Fidelis, Jahreszeiten s'articule autour de quatre complaintes de plus de dix minutes chacune ("Herbst" multiplie même par deux cette durée). C'est dire si les Allemands prennent leur temps et un malin plaisir à appuyer là où ca fait mal, à photocopier un même riff lancinant pendant tout un morceau. Avec Nargaroth, on se sait jamais si l'on a affaire à un total foutage de gueule ou au contraire à un trait de génie. Il faut donc choisir son camp. La raison voudrait que l'on soit du premier avis. Pourtant, les écoutes aidant, on finit toujours à être envoûté par cette trame usée jusqu'à la corde. Régurgitations vocales, guitares obsédantes et polluées, rythmique martiale aliment un art noir néanmoins unique dans sa façon d'imbriquer tous ces éléments.
De fait, Nargaroth est presque détenteur d'une recette dont il a déposé le brevet. Beaucoup l'imitent mais peu parviennent à égaler cet équilibre constant entre fumisterie et pénétration hypnotique. Malgré leur longueur, ces pulsations fielleuses parviennent à ne jamais lasser. Difficile de fait, de résister à l'entêtant "Sommer" dont la simplicité n'a égale que l'impact de son accroche. Même l'atmosphérique "Herbst", ses préliminaires interminables mais emprunts d'une gravité ténébreuse, sa moitié d'ossature instrumentale et tellement répétitive que c'est un euphémisme que de le dire, s'impose comme un tour de force et l'apogée de ce menu remplit jusqu'à la gueule car il dévoile une intimité aux multiples césures. Ce titre se mérite car il faut s'armer de courage pour survivre aux dix premières minutes d'une lenteur étouffante. Tout du long, le misanthrope se déchire en terme de riffs menstruels qui vous poissent les oreilles, comme le démontre également l'ode finale, "Winter", théâtre d'un black metal plus rapide bien que toujours très mélodique. Avec Jarheszeiten, Nargaroth fait son Nargaroth, ce qu'il sait faire de mieux donc. Les amateurs ne seront pas déçus au contraire par cet album de première bourre et peut-être même le meilleur des Allemands depuis le fabuleux Geliebte des Regens. Une référence. (2009) ⍖⍖⍖
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