23 octobre 2009

Krönik | Orthodox - Sentencia (2009)




2006. Gran Poder ou la porte ouverte sur un doom incantatoire aux confins du drone. En l'espace de quatre plaintes, Orthodox s'imposait comme un des prêtres les plus envoûtants de cette religion. Nous n'étions pourtant pas au bout de nos surprises. 2007. Amanecer En Puerta Oscura ou l'illustration d'une sorte de doom transgénique, auberge espagnole où vinrent se mêler de nombreux corps chauds pas forcément faits pour s'emboiter. Le groupe commence alors à lâcher les amarres pour naviguer sur des eaux vierges conduisant vers le progressif le plus nébuleux. 2009. Sentencia. Les Espagnols poursuivent leur mue. Parler désormais de doom à l'encontre de leur travail parait pour le moins absurde tant celui-ci échappe aux invariants du genre. Trois plages le structurent dont l'épicentre reste la longue pièce "Ascension", qui remplit à elle toute seule, du haut de ses 26 minutes la quasi totalité de la cérémonie. Encadré par un prologue instrumental aux accents hispaniques, "Marcha De La Santa Sangre" et par une dérive schizophrénique aux atours liturgiques, "... Y La Muerte No Tendra Dominio", le coeur de Sentencia donne tout son sens à ce titre. Sentencieux, aride, organique, étrange aussi, il débute par un va et vient d'instruments tels que le piano et des cordes qui égrènent une complainte déglinguée sur fond de roulements de batterie. 



Parfois à la limite de la cacophonie et en cela, plus proche du prog à la King Crimson (on y pense beaucoup) et surtout de la musique classique contemporaine que du pur doom, "Ascension" semble vouloir aller nulle-part ; il donne l'impression de n'être guidé par aucune logique, aucun but. Aucun sens. Puis, le chant qui scande une interminable supplique , surgit. Peut-être servira-t-il de balise à laquelle se raccrocher. En vain. Il ne fait que plonger encore davantage cette masse aux formes floues dans les arcanes d'une invocation qui confine à la tragédie et se mérite pour être domptée, apprivoisée. Et comprise. Mais peut-être aussi n'y a-t-il rien à comprendre... A l'image de ce saxophone au gout de rouille qui vomi des râles stridents. A l'image de cette architecture dont le concepteur a mélanger les plans. Incompréhensible sans doute mais d'une beauté fiévreuse certaine, notamment lors de la dernière ligne droite, quand bien même celle-ci n'a rien de rectiligne. Graves et solennelles, les notes de piano suintent une tristesse moite avant le rythme donne l'impression de vouloir s'emballer, ce qu'il ne fait pourtant pas. Plus on se rapproche de l'issue, plus "Ascension" devient grande, se pare d'une puissance belle à en pleurer et prend alors toute sa dimension mystique et religieuse. Et c'est bien en l'observant dans son ensemble que cette respiration tourmentée dévoile tout son sens. Plus expérimental que jamais, Orthodox témoigne avec sentencia d'une cohérence plus grande encore que sur Amanecer En Puerta Oscura, qui en devient désormais une espèce d'ébauche. Peu accessible mais d'un charme irréel. Superbe et précieux. (2009) ⍖⍖⍖



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