Fort d’une discographie bordélique riche depuis 1997 d’un nombre incalculable de démos et de splits (avec Evil, Draugwath, Inferno, Goatfire), Celestia est un des points de convergence de la scène black metal française où se sont croisés des membres de Peste Noire, Alcest, Genocide Kommando, Gestapo 666 ou bien encore Amesoeurs. Après un premier album, Apparitia – Sumptuous Spectre, longtemps attendu comme le messie, ce sombre navire, qui a quelque chose d’une silhouette spectrale échappée des brumes du Nosferatu de Murnau, guidé par l’âme tourmentée de Noktu Geiistmortt, notamment secondé cette fois-ci par Malefic, le maître à penser de Xasthur, livre enfin avec Frigidiis Apotheosia, sa seconde offrande. Pour ceux qui ne le connaissent pas, sachez que Celestia se veut le chantre d’un black metal aristocratique, intellectuel et classieux, d’essence norvégienne, d’une froideur cadavérique, mélodique et atmosphérique parfois, nihiliste et désenchanté toujours. Celestia est à l’art noir ce que Baudelaire est à la poésie. Cette musique suinte la mort par toutes les notes, portées par des paroles d’un érotisme morbide, d’un romantisme nécrophilique.
Avec cet album, Noktu offre un nouveau chapitre à sa destinée, plus soigné (à l’image des ambiances posées, des arpèges introduisant le très beau “ A Regrettable Misinterpretation Of Mournfulness ” notamment), plus tragique également. Plus spirituel aussi. Une chape de souffrance et de solitude s’abat sur vous dès le vicieux et obsédant “ She’s Dead (valse funeste de décomposition)”, qui ouvre le chemin de cette marche funèbre et sexuelle mais une sexualité vierge de toute trace d’amour, une sexualité macabre, déviante et malsaine. Ecouter Frigidiis Apotheosia revient à faire l’amour avec un cadavre. Il faut avoir soit même souffert des sentiments pour pouvoir s’immerger en profondeur comme le réclament ces huit plaintes, ces huit cris de haine, ces huit manifestations d’une négation absolue et sans retour. Pourtant rares seront ceux qui y parviendront. Le Black Metal doit de toute façon rester un art pur et uniquement accessible à une minorité. D’un lyrisme mortuaire, elles exsudent une beauté noire qui les imprègne d’un mysticisme sinistre ; elles touchent l’âme autant que le coeur. Hors du temps hors des modes, ni suicidaire ni true black mais un peu des deux à la fois, Celestia poursuit seul son chemin vers un ailleurs de la décrépitude dont son géniteur est la vigie funeste. Une œuvre à part au sein de la scène black metal hexagonale, cela ne la rend que plus rare et précieuse encore. Apparitia – Sumptuous Spectre incarnait la fin d’une ère, en sera-t-il de même pour Frigidiis Apotheosia ? (2008) ⍖⍖⍖
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