30 juin 2009

Profetus | Coronation Of The Black Sun (2009)




Autrefois emprisonné dans l'ornière de l'underground le plus vicié, le funeral doom est désormais à la mode. Doit-on pour autant s'en féliciter ? Pas sûr lorsque l'on constate que le premier misanthrope venu peut vomir une oeuvre du genre, tout seul dans sa cave à l'aide d'une guitare et d'un bon logiciel. Heureusement cette chapelle n'a jamais été inféodée à l'unique notion d'originalité et c'est davantage de sincérité qu'elle se nourrit, ainsi que de la capacité à exprimer avec des notes des atmosphères suicidaires et des sentiments tels que la solitude, la tristesse ou l'apathie. Depuis les travaux matriciels de Shape Of Despair, Evoken ou Tyranny, tout semble avoir été dit dans un créneau aux invariants tout de même clairement figés. Pourtant, ce type de doom nous réserve encore quelques bonnes surprises. Profetus en est la preuve. Il apporte sa pierre à cette longue litanie de groupes finlandais qui se sont imposés pour mission d'ériger un golgotha absolu de souffrance. Avec à son bord, un ancien membre d'Horna (Anssi Mäkinen), cette entité braconne certes sur des terres bien balisées qu'elle ne cherche d'ailleurs pas à transcender ni à quitter mais elle le fait avec une puissance d'évocation absolument superbe.




Coronation Of The Black Sun, qui succède à la démo Saturnine, est donc un bloc vaporeux qui se fissure en quatre pans (dont une intro) en cinquante minutes sentencieuses qui résonnent comme une agonisante marche funèbre drapée sous une pluie hivernale. Le chant donne l'impression de s'extraire des profondeurs des Fosses Marianne, vigie brumeuse nous guidant dans ces excavations abyssales d'une lenteur insupportable, les claviers sinistres dressent un socle rongé par des assauts mortifères tandis qu'une batterie plombée forme les piliers sur lesquels reposent cette cathédrale doloriste. Etouffantes, ces échappées sont grevées par une inexorabilité qui confine à l'abandon, à la résignation ; elles sculptent au burin dans la froideur du marbre des sillons suicidaires dont le modelé semble être noyé dans un hiératisme solennel et effrayant. Mais toujours, Profetus parvient à éviter le piège fâcheux - et principal écueil dans lequel s'abîme bon nombre d'autres formations du genre - du monolithisme poussé dans ses derniers retranchements. Ainsi, bien qu'ils ne concèdent rien, qu'ils n'éclairent aucune lumière dans cette nuit à la noirceur opaque, les Finlandais savent briser cette léthargie avec subtilité, à l'image du final sublime de "The Eye Of Phosphoros", avec ses lointains choeurs féminins ou ses timides sons d'orgue aux accents liturgiques. Même un appel des limbes tel que le terminal "Blood Of Saturn", qui paraît ne jamais vouloir s'achever avec ses coups de boutoir répétitifs à l'infini, irradie une beauté ténébreuse à laquelle il est bien difficile de résister. Du moins si l'on se trouve dans l'état d'esprit requis, celui d'une dépression tragique et d'un mal être sourd. Du maintes fois déjà entendus, c'est vrai. Ceci dit, Profetus récite sa leçon avec assurance et maîtrise. Ne boudons pas notre plaisir (?) ! (2009)


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