Musicien-pieuvre, Nachtzeit est bien connu des services d'une certaine frange du black metal suédois. Attention, pas celle des Marduk et autre Dark Funeral qui conjugue le genre avec rapidité supersonique digne du lapin Duracel. Non plutôt celle des Shining, Lifelover. Bref, un black metal qui sert de cordes aux âmes dépressives, un black metal où le sens des atmosphères prime sur l'agression à tout prix. Autrefois batteur de Hypothermia, notre suédois se démultiplie à volonté à travers une belle brochette de projets charbonneux : Nihilum, Durthang, Mortem Parto Humano... Parfois secondé par un misanthrope comme lui ou plus généralement seul, il trouve dans Lustre le véhicule le plus sérieux pour exprimer ses pensées, sa philosophie.
Là où la plupart de ses formations peinent à dépasser le stade des démos et des splits, celle-ci, bien qu'ayant vu la nuit seulement en 2008, délivre déjà sa première offrande, après un EP - Serenity - annonciateur de grandes choses. Sillonnant les terres torturées d'un Art Noir comme Varg Vikerness l'a défini à partir de Filosofem et plus encore avec ses deux successeurs gravés derrière les barreaux, Lustre est le type d'entité qui ne peuvent proliférer que dans le cadre du one-man-band. L'architecture, squelettique et minimaliste, offre ainsi cette possibilité. Glorifiant les forces nocturnes et mystérieuses de la nature, Night Spirit se scinde en deux (très) longues complaintes arides de près de vingt minutes chacune, au substrat essentiellement instrumentale. Simple râle, le chant ne fait qu'affleurer à la surface tandis que les claviers s'imposent comme le guide de cette musique lancinante et répétitive à l'extrême aux confins de l'ambient, témoin, la première partie construite sur un lit de synthétiseurs qui égrènent des notes décharnées tandis que le tempo avance à la vitesse d'une limace ayant absorbée du valium par boîte de douze. Mais Nachtzeit s'y entend pour installer un climat hypnotique teinté de mysticisme, crépusculaire et beau à la fois. Avec son fracas de riffs en guise de préliminaires, le second pan écarte ses cuisses avec une lenteur étouffante, interminable marche funèbre figée dans un monolithisme toutefois moins absolu que celui plombant sa devancière. Moins présents car ils n'en forment cette fois-ci pas les arc-boutants, les claviers cèdent la place à des guitares qui ne parviennent jamais à décoller, elles qui érigent un mur des lamentations absolument superbe. Les gargouillis sont toujours aussi brumeux, fantomatiques quasiment, mais ce dérelict majestueux dérive dans des eaux plus agitées et plus noires encore. D'un noir d'encre, celui de la nuit lorsque aucune étoile ne vient l'adoucir, quand bien même Night Spirit se s'abîme jamais totalement dans la fosse. On pense donc beaucoup au Burzum dernière époque mais avec cette gravité dans les tons qui a tant manqué à un Hlidskjalf par exemple et surtout à l'ancrage dans le black metal évident. Avec Night Spirit, Nachtziet vient très certainement d'accoucher de son oeuvre la plus aboutie à ce jour. (2009 | LHN)
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