21 février 2022

KröniK | Withered - Verloren (2021)




Avec pas loin d'une vingtaine d'années d'activisme dans les godasses, Withered peut difficilement se confondre avec une bande de puceaux désireux de faire peur à papa maman, enfermés dans leur garage. Pourtant, alors qu'il a vu quand même passer dans ses rangs à la fois Colin Martson (Krallice, Gorguts) à la basse et Ethan McCarty (Primitive Man) qui fut longtemps sa voix et l'une de ses guitares, le groupe demeure toujours prisonnier de l'ornière de la confidentialité. Comment l'expliquer ? 

Si le fait que les Américains se soient murés dans le silence depuis onze ans, ne sculptant que Grief Relic en 2016, n'est sans doute pas étranger à une renommée en berne, c'est surtout dans la nature même de leur musique qu'il faut gratter les raisons de ce maigre succès commercial. Car, autant l'énoncer d'emblée, Withered ne fait rien pour plaire. Ni lumière ni mélodie ne filtrent jamais d'un matériau au maillage tendu où une architecture aussi meurtrie que massive se conjugue à des vocalises hurlées et maladives. 


Les Ricains matérialisent la souffrance et la colère sans faire de quelconques compromis à une forme de beauté sinon d'espoir : noir c'est noir, tandis que la lourdeur tumultueuse vrillant les instruments au complet érige la forteresse d'un asile dont on ne peut s'échapper. De là l'extrême difficulté à imprimer dans nos cerveaux pourtant bien ravagés et ouverts à toute forme de supplice sonore une partition dont on peine à retenir la moindre trace. Le renouvellement de son line-up ne change rien à l'affaire ; Withered reste cette formation respectée pour ses qualités techniques mais vierge de chaleur et d'âme. 

A l'instar de ses aînés, Verloren se révèle pénible à pénétrer, empilement de strates dressant un bloc inviolable n'offrant ni échappatoire ni même la moindre petite aspérité pour s'y accrocher. Le caractère ramassé des compos (à l'exception de deux d'entre elles qui dépassent les huit minutes) ne les rend pas moins complexes, leurs boyaux grouillant d'une sourde tension. Cet opus est un monstre accouplant death et sludge en un maelström étouffant. Du premier, il conserve le goût pour les structures brisées et du second, il presse le jus épais d'une noirceur nihiliste. Un rare chant clair ('By Touth In Tongue'), des accords malsains ('Dissolve') ne suffisent pas à extraire cet album de l'impression de magma qui nous emporte. 

Pourtant de cette repoussante masse de béton rongée de l'intérieur par de tentaculaires galeries suintent non pas des émotions mais l'ambiance désincarnée d'une froide décrépitude. Mais Verloren demeure un disque à l'accès ardu et Withered, une entité à laquelle on a du mal à s'attacher. C'est aussi ce qui fait sa personnalité...  (27.06.2021 | MW) ⍖

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire