Au milieu de la médiocrité et du conformisme ambiants, il est toujours agréable de dénicher un groupe tel que Thumos qui rompt avec les standards tant formels que thématiques qui balisent le doom, genre auquel il est arrimé. Maladroitement peut-être. De façon réductrice sans aucun doute mais nous y reviendrons.
Son nom emprunté notamment à Platon comme son esthétique inspirée de la Grèce antique annoncent d'emblée une formation singulière dont on ne sait rien si ce n'est son origine américaine et laissant deviner un univers à la défloration ardue mais certainement passionnante. Son caractère intégralement instrumental participe de cet abord difficile qu'une prise de son dépouillée, pour ne pas dire frustre, rend plus bourru encore.
Cette absence de chant associée à des aplats extrêmement lourds laisse tout d'abord entrevoir une expression post rock. Ou post metal, post doom, comme vous voulez. Très vite pourtant, on mesure que cette définition se fracasse contre une musique vierge de tout élan atmosphérique, de toute velléité aérienne. Thumos reste définitivement prisonnier d'une gangue terreuse qu'il remue à grands coups de riffs plombés, d'accords engourdis par une inexorables tristesse. La rythmique croûteuse ne sert que de socle sur lequel les guitares règnent donc en seigneurs. Comme si les musiciens cherchaient à dompter l'énergie noire libérée par cet instrument.
EP 4 titres (pour presque une demi-heure de son tellurique quand même), The End Of Words pourra sembler monotone mais, outre le fait que le désespoir endeuillé qui l'enserre ne peut que toucher l'âme et le cœur, une forme de progression l'emporte cependant tout du long sur l'immobilité. Chaque compo grouille dans ses artères d'une sève bouillonnante qui lui confère une force aussi souterraine qu'obsédante. A l'image par exemple de 'Epithumetikon' dont les riffs granuleux minés par une désolation absolue le vrillent et l'entraînent à travers un funeste chemin.
Que dire aussi de ce 'Thumoeides' presque accrocheur en comparaison (tout est relatif) dont l'épaisse lourdeur se conjugue à une ardeur néanmoins avortée et toujours brisée par cette mélancolie funèbre. Par leur dénuement rugueux, ces morceaux possèdent quelque chose de brouillon, d'ébauche. De squelette presque, auquel on aurait retiré les derniers morceaux de peau. Au point de croire que The End Of Words ne serait qu'une démo. Mais là réside aussi la personnalité de ce mystérieux groupe fuyant les artifices, ce qui n'exonère jamais son doom d'une sourde beauté, témoin le douloureux 'Metempsychosis' dont les traits osseux irradient une puissante dramaturgie.
Thumos est donc un groupe très particulier, artisan d'un post doom débarrassé de tout superflu mais cependant lourd et tragique. A découvrir impérativement ! (02.07.2021 | MW) ⍖⍖⍖
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