Blacklisté comme d'autres (Joseph Losey par exemple) durant les années 50 qui ont vu l'Amérique s'enflammer avec le Maccartysme, Cy Enfield se tourne alors vers la Grande-Bretagne, où il pond Zoulou, son meilleur film avec Train d'enfer (1958). Après une première partie un brin longuette mais néanmoins nécessaire car elle présente les divers protagonistes, tout en rendant la menace des Zoulous de plus en plus palpable, le film trouve sa force et sa grandeur durant la double attaque des valeureux et sanguinaires autochtones, qui viennent quelques heures plus tôt de rentrer dans l'Histoire avec le massacre qu'ils ont perpétré et qui fera lui-même l'objet d'une adaptation cinématographique en 1978 avec L'ultime attaque de Douglas Hickox. L'affrontement, remarquablement mis en scène par Endfield, est terrible, presque barbare. Les combats s'avèrent très violents, très durs, sans fioritures et ce, bien qu'ils s'achèvent sur un surprenant happy end que l'on espérait sans trop y croire cependant. Zoulou, c'est un peu Alamo en Afrique du Sud avec le même principe, très efficace, du groupe d'hommes enfermés dans un lieu unique et assaillis par un ennemi mortel. Sauf qu'ici, l'issue est favorable pour les héros (colonisateurs au demeurant). On pourrait quasiment parler de western colonial avec les Zoulous à la place des Indiens. Cependant, l'oeuvre de Cy Endfield n'est pas qu'un grand film d'aventure. Déjà, de part sa violence, il montre la guerre sous l'angle de la dureté, débarrassée des oripeaux romantiques chers au cinéma classique. De plus les Zoulous échappent au manichéisme. A la fin, loin de brutes sauvages, ils reconnaissent les mérites et la valeurs des Anglais et renoncent à les massacrer (la réalité sera moins idéaliste). Enfin, Zoulou se pare d'une touche sociale à travers le face à face entre deux soldats issus de couches sociales différentes et que tout oppose donc. Stanley Baker et Michael Caine, qui les incarnent, sont magnifiques. Le premier prête son physique puissant à l'homme de terrain, sans doute d'origine prolétarienne tandis que le second, alors à ses débuts, en déroulant son légendaire flegme tout britannique, joue à merveille le jeune lieutenant précédé d'une longue tradition familiale dans l'armée. D'abord un peu hautain, il se rendra compte de la réalité de la guerre, loin des écoles militaires. Sur le champ de bataille, face à la mort, tous les hommes baignent dans le sang et la sueur. Cette réflexion sur l'absurdité des conflits permet à Zoulou, au-delà de ses qualités techniques, d'échapper à la banalité et de demeurer un des grands films du genre des années 60. (vu le 10.10.2020) ⍖⍖⍖
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