4 mai 2020

Angellore | Rien ne devait mourir (2020)




Angellore est un peu comme l'enfant que l'on voit grandir, dont on suit l'évolution ainsi que l'affirmation d'une personnalité qui s'esquisse tranquillement jusqu'à atteindre la maturité. "Elégies aux Ames Perdues", publié en 2009, ce qui semble être une éternité, a scellé notre rencontre. Le groupe n'est alors encore qu'une hydre à deux têtes, celles de Walran et de Rosarius, mais le désir de poursuivre la quête d'un gothic doom romantique et néanmoins mortuaire, entamée dans les années 90 par Tristania (entre autres) puis laissée en jachère, est déjà là. "Errances" et plus encore "La Litanie des Cendres" n'ont pas seulement fixé sa signature, plus atmosphérique sans doute tout en demeurant le fourreau d'un doom baudelairien, ils ont témoigné de l'ambition et de l'exigence de celui qui s'est peu à peu mué en un véritable groupe au point de le rendre presque méconnaissable tant les progrès réalisés en quelques années se sont révélés impressionnants. Il paraît évident que "Rien ne Devait Mourir" permet aux Français de franchir encore une étape. Que cinq (trop longues) années leur aient été nécessaire pour venir à bout de ce monument ne surprend pas. Pourtant de son écoute se dégage une impression de fluidité, voire de sérénité qui contraste à la fois avec l'immense travail abattu par les musiciens et la richesse foisonnante nichée dans son intimité. De cette soixantaine de minutes, répartie en six titres, il y a tant à dire. A commencer, forcément, par 'A Romance Of Thorns', pièce-fleuve qui, à elle seule, remplit un quart de l'album ! En choisissant de pousser les portes de celui-ci avec cette composition, Angellore n'opte pas pour la facilité : ce genre de marathon sonore est pavé d'embûches et risque, s'il est réussi (ce qui est le cas), d'écraser le reste du menu.



Autant l'affirmer de suite, si cette troisième obole longue durée ne devait durer que ces vingt minutes, elle serait quand même indispensable, véritable récit tout en progression où ambiance monastique, chant féminin magnifique, growls masculins et mélodies entêtantes que ne renierait pas Schwadorff  (Empyrium, Noekk), l'éternelle influence de Walran, se mélangent dans une palette aux couleurs tragiquement romantiques, aboutissant à une toile de maître dont les détails ne se révèlent que par petites touches. On sort de ce titre, heureux et fasciné par le résultat qui dépasse toutes les attentes mais dont il serait dommage qu'il occulte les morceaux suivants qui tous méritent d'être cités.Deux autres sentinelles balisent ce chemin de croix sacrificiel. 'Drowned Divine' épouse les traits d'une lente et rêveuse déambulation à laquelle les lignes de violon et la toile que tissent les guitares enracinent dans l'humus du Empyrium époque "Songs Of Grief & Misty Fields". A nouveau la présence vocale de Lucia irradie ces paysages gelés d'églises abandonnées que cette partition nous évoque. Fermant le caveau, 'Que les Lueurs se Dispersent' brille d'un éclat poétique, dialogue entre Rosarius et la chanteuse dont l'intensité est soulignée par des arrangements encore une fois de toute beauté.Trois plaintes plus courtes mais non moins dignes d'éloge se glissent dans le menu qu'elles contribuent à aérer. 'Dreams (Along The Trail)', se révèle être un bijou d'écriture et d'atmosphères boisées qui porte la marque de Walran cependant que 'Blood For Lavinia' nous rappelle le rock gothique de Paradise Lost et de Moonspell. Quant à 'Sur les Sentiers de Lune', il s'agit d'une pièce instrumentale riche d'une emphase douce et dramatique. Les mots manquent face à un tel pavé dont on sent qu'il a été élaboré dans ses moindres détails, ne laissant aucune prise à la maladresse, œuvre qui démontre les hauts standards de qualité de ses créateurs, artistes aussi humbles qu'exigeants. Il serait tentant de parler aboutissement au sujet de "Rien ne Devait Mourir"  mais cela suggère une idée d'achèvement alors qu'on devine qu'Angellore ne s'arrêtera assurément pas là, nous réservant encore de très belles surprises et de précieux moments en sa compagnie... (28.02.2020 | Music Waves) ⍖⍖⍖




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