Oppressant,
brumeux, sinistre, tels sont les adjectifs qui viennent à l'esprit au moment de
décrire "Ominousium", seconde offrande forgée par Kave, entité
solitaire qui a vu la nuit au Pays-Bas il y a déjà quelques années. Le fait
qu'il ait scellé une alliance avec Cyclic Law devrait non seulement offrir au
projet une exposition inédite mais surtout une reconnaissance, Frederic Arbour,
le patron de l'écurie canadienne, n'ayant pas pour habitude de promouvoir la
médiocrité. Dont acte. De fait, cet
album porte clairement le sceau de ce label devenu avec Cryo Chamber notre
principal fournisseur en (dark) ambient, tant dans la forme, celle d'un noble
digipack aux couleurs sombres que dans le fond, théâtre d'une masse sonore
grondant d'une force tellurique. Tous les invariants propres au genre sont
alignés avec application par Bram Gollin, maître de cérémonie qui ne cherche
d'ailleurs pas à transcender un matériau qui lui sert de terreau fertile à
l'expression d'émotions d'une beauté mortifère. Œuvre relativement courte
(moins de quarante minutes), "Ominousium" s'articule autour de six
complaintes qui épousent la forme de froides étendues, figées par un souffle
désespéré. Dès 'A House Amongst The Weeds', prologue hanté par d'inquiétantes
silhouettes venues du passé, le Hollandais installe un climat quasi méditatif
sinon introspectif quoique chargé d'atmosphères funèbres. L'écoute tend
vers la déambulation, la dérive le long de corridors avalés par une obscurité
opaque, à travers laquelle se dessinent des images de mort et de souffrance
('The Tribes Of Nyx'). Les pistes se succèdent, de plus en plus désincarnées,
charriant une désolation absolue ('Wind Apathia') jusqu'à cette conclusion
éponyme qui tapissent les murs de sonorités sourdes pendant plus de douze
minutes s'étirant à l'infini avec un sens de l'épure, du minimaliste morbide,
aussi admirables que terrifiants. Peu à peu, 'Ominousium' s'élève sans pour
autant exploser, comme si le musicien cherchait à repousser le plus longtemps
possible une tension finalement avortée. Jamais appuyé, l'album suggère plus
qu'il n'impose, laissant celui qui le pénètre toute liberté pour faire sien ce
kaléidoscope autant visuel qu'auditif, invite douloureuse au recueillement et à
la solitude. Comment de toute façon écouter une telle création sinon dans la
pénombre, seul face à ses démons ? D'une tristesse lugubre, cet opus se révèle
être la bande-son d'une noire contrition. (2016)
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