19 mars 2016

Kave | Ominousium (2015)


Oppressant, brumeux, sinistre, tels sont les adjectifs qui viennent à l'esprit au moment de décrire "Ominousium", seconde offrande forgée par Kave, entité solitaire qui a vu la nuit au Pays-Bas il y a déjà quelques années. Le fait qu'il ait scellé une alliance avec Cyclic Law devrait non seulement offrir au projet une exposition inédite mais surtout une reconnaissance, Frederic Arbour, le patron de l'écurie canadienne, n'ayant pas pour habitude de promouvoir la médiocrité. Dont acte. De fait, cet album porte clairement le sceau de ce label devenu avec Cryo Chamber notre principal fournisseur en (dark) ambient, tant dans la forme, celle d'un noble digipack aux couleurs sombres que dans le fond, théâtre d'une masse sonore grondant d'une force tellurique. Tous les invariants propres au genre sont alignés avec application par Bram Gollin, maître de cérémonie qui ne cherche d'ailleurs pas à transcender un matériau qui lui sert de terreau fertile à l'expression d'émotions d'une beauté mortifère. Œuvre relativement courte (moins de quarante minutes), "Ominousium" s'articule autour de six complaintes qui épousent la forme de froides étendues, figées par un souffle désespéré. Dès 'A House Amongst The Weeds', prologue hanté par d'inquiétantes silhouettes venues du passé, le Hollandais installe un climat quasi méditatif sinon introspectif quoique chargé d'atmosphères funèbres. L'écoute tend vers la déambulation, la dérive le long de corridors avalés par une obscurité opaque, à travers laquelle se dessinent des images de mort et de souffrance ('The Tribes Of Nyx'). Les pistes se succèdent, de plus en plus désincarnées, charriant une désolation absolue ('Wind Apathia') jusqu'à cette conclusion éponyme qui tapissent les murs de sonorités sourdes pendant plus de douze minutes s'étirant à l'infini avec un sens de l'épure, du minimaliste morbide, aussi admirables que terrifiants. Peu à peu, 'Ominousium' s'élève sans pour autant exploser, comme si le musicien cherchait à repousser le plus longtemps possible une tension finalement avortée. Jamais appuyé, l'album suggère plus qu'il n'impose, laissant celui qui le pénètre toute liberté pour faire sien ce kaléidoscope autant visuel qu'auditif, invite douloureuse au recueillement et à la solitude. Comment de toute façon écouter une telle création sinon dans la pénombre, seul face à ses démons ? D'une tristesse lugubre, cet opus se révèle être la bande-son d'une noire contrition. (2016)


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire