En
attendant de pouvoir déguster "Gates Of Flesh", la prochaine cuvée de
Lord Vicar, nous ne saurions trop conseiller aux admirateurs de son chanteur,
Christus, de se jeter sur "Purgatory Under New Management", sa
seconde offrande sous la bannière de Goatess, groupe qu'il a fondé en 2009.
Faut-il encore présenter Christian Lindersen (son vrai nom), vétéran de la scène
doom et stoner suédoise ? De Count Raven à Terra Firma en passant par Saint
Vitus, son palmarès laisse rêveur et sa contribution au genre force le respect.
Bref, fils spirituel d'Ozzy Osbourne, avec lequel il partage cette même voix un
peu nasillarde de canard embrumé, l'homme est une légende et les rondelles
qu'il hante de sa présence tutélaire, sont autant le gage d'une qualité indélébile
que d'une teneur en plomb sabbathien. Goatess est le réceptacle de sa dévotion
à un style qui est en réalité bien plus que cela mais un véritable sacerdoce,
Passion qui va au-delà de la simple musique. Trois ans après un premier jet
éponyme déjà excellent, "Purgatory Under New Management" enfonce
encore davantage le clou, chapelet fabuleux fait du doom le plus pur, celui qui
n'oublie jamais ses racines heavy. Parfois très proche du Sabbat Noir originel,
comment ainsi ne pas songer au dinosaure anglais en écoutant des hosties coulées dans le fer de l'acabit
de 'Shadowland' ou 'Silent War', l'œuvre est une manière de leçon, enfilade de
perles toutes plus jouissives les unes que les autres, où émerge cependant le
gigantesque 'Wrath Of God', cathédrale de désespoir dont les piliers sont ces
lignes de guitare profondément ancrées dans les abîmes de la terre, dignes d'un
Tony Iommi en très grande forme. Profitons de l'occasion d'ailleurs pour
souligner le travail abattu par le dénommé Niklas, dont le jeu tour à tour
tellurique ou racé propulse ces compos vers des sommets, comme l'illustre
'Crocodilians And Other Creepy Crawling Shhh...' qu'il zèbre d'un lancinant
solo aux teintes psyché. Il forme avec Christus l'arc-boutant principal de cet
édifice aux robustes soubassements. Ultra pesants quoique dynamiques, ces
titres reposent sur une architecture sinueuses, témoin ce 'Moth To Flame' qui,
après une entame presque légère (tout est relatif), plonge brutalement au bout
de deux minutes, dans l'obscurité d'une crypte dont les marches semblent
s'enfoncer dans les ténèbres. Si certains morceaux se révèlent plus
accrocheurs, à l'image de 'Murphy Was An Optimist', l'ensemble est prisonnier
d'une épaisse gangue rocailleuse suintant une mélancolique beauté mais se pare
pourtant d'un suaire chamarré. Il n'y a rien, absolument rien à jeter de cet
opus qui récite le credo avec une admirable science du riff sentencieux et des
vocalises solennelles. Un chef-d'œuvre ? Peut-être pas mais Goatess n'est pas
tombé loin... (2016)
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