25 janvier 2016

Carma | Carma (2015)


On ne soulignera jamais assez toute la noirceur cryptique suintant de nombreuses hosties lusitaniennes. Des plus exposés (Moonspell, Ava Inferi) aux plus obscurs (Irae, Bosque), bien des groupes portugais possèdent cette faculté rare d'avaler jusqu'à la plus petite trace de lumière. Il n'est donc pas surprenant que le Funeral Doom ait essaimé dans la péninsule car le genre y trouve l'humus mortifère idéal pour proliférer. Les apôtres de cette chapelle ne s'expriment toutefois pas de la même manière que leurs frères de douleur scandinaves. Pas de langueur glaciale léchant de vastes étendues gelées ici mais au contraire un art aux atours souvent abrupts, presque granitiques et dont les racines Black metal font plus qu'affleurer à la surface, ce qu'illustre Carma dont cette offrande éponyme est aussi la première. Mystérieux, le groupe n'offre aucune information quant à l'identité de ses membres. Il ne reste donc plus que la musique, pétrifiée, suffocante. Noire. Après 'Sonhos' un prologue squelettique que tissent clavier endormi et guitare grêle, l'écoute plonge d'un coup dans les arcanes de la terre avec l'effrayant 'Procissão', bathyscaphe caverneux long de près de 8 minutes que hantent râles d'outre-tombe, accords sinistres et rythmique léthargique. Pourtant, le tout, non dénuée d'une forme de beauté souterraine, n'est parfois pas loin de sonner presque mélodique. Tout est relatif, bien entendu. Impression confirmée ensuite par 'Feto' dont les premières mesures entre post Rock et Shoegaze sont toutefois et heureusement vite phagocytées par une noirceur de grotte ténébreuse dont les parois subissent les secousses d'une guitare ferrugineuse. Plus proche de l'école britannique dont on retrouve chez lui ses mêmes lignes de six-cordes engourdies par une absolue inexorabilité, Carma racle les chairs avec un sens de l'épure froide et minérale, à l'image de 'Reflexo', lente descente au fond d'un puits sans fin, qu'éclaire néanmoins un pâle rai de lumière. Que dire aussi de 'Lamento', véritable procession funéraire sans aucun espoir de retour dont les coups de boutoir résonnent comme d'ultimes battements de cœur. Nous tenons donc là une de ces petites offrandes au charme obscur que seul l'underground le plus crépusculaire peut enfanter. (2015)


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