15 juin 2010

KröniK | Svart - Förlorad (2010)


Si tout un pan du black metal s’est bâti sur la notion de répétition lancinante, celui qui ramone les cavités les plus dépressives, il n’est pour autant pas si simple de ruminer de longues complaintes suicidaires basées sur une poignée d’accords. N’est pas Burzum qui veut. Et s’il y a bien une entité qui maîtrise cette science hypnotique c’est bien Svart, un des multiples projets qui occupent Christian Larsson de Livsnekad. Mieux, avec Förlorad, le Suédois repousse encore davantage les limites en terme de sustain, de ritournelles morbides. Divisée en trois parties, cette seconde offrande forme en fait un seul et même ensemble hallucinant dans cette manière de répéter un canevas identique sur des durées portées à leur paroxysme.
Par conséquent, on pourrait croire que Svart frôle constamment le je-m’en-foutisme, c’est le danger avec ce type de black metal qui confine à la transe. Ce n’est pourtant jamais le cas et le miracle a bel et bien lieu. Ces trois plaintes sont chacune un monument qui va encore plus loin que la précédente dans l’installation d’un climat sinistre et beau à la fois. Long de près d’un quart d’heure, la première d’entre-elle s’enfonce dans un bourbier instrumental guidé par ces accords osseux qui coulent d’une guitare grêle. Plus longue de cinq minutes, le second segment est d’une telle lenteur agonisante qu’il ne semble jamais vouloir démarrer. Le temps paraît suspendu, pendant que le solitaire tricote au-dessus d’un gouffre un modelé minimaliste qui vous engourdit peu à peu. Puis au bout de sept minutes environ, le chant surgit et le tempo s’abîme encore un peu plus dans les arcanes de la terre. Constamment passionnant, le titre est percé par des fissures mélancolique absolument magnifiques. Mais c’est bien lors des quarante (!) minutes de la dernière partie que Förlorad culmine en un Everest de couleurs dépressives, interminable dérive qui meurt progressivement et montre à quel point le bonhomme sait dessiner les courbes d’un univers crépusculaire avec une économie de moyens admirable. Une batterie lointaine, un chant qui ne l’est pas moins et surtout ces accords répétés à l’infini suffisent à déterminer un art noir plus atmosphérique que négatif, jamais ennuyeux et beau à pleurer toujours. On peut le dire, Förlorad est un incontestable chef-d’œuvre du genre, froid et empreint d’une tristesse absolue, témoin d’un profond sentiment d’inexorabilité. 4.5/5 (2010) | Facebock


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