25 avril 2010

LA CAVE DE CHILDERIC THOR : SOLSTAFIR - Köld (2009)

Spikefarm - 9/10 - MySpace

On en prend conscience aujourd'hui avec satisfaction, la direction entamée par son opus précédent, Masterpiece Of Bitterness n'aura donc pas abouti à un cul-de-sac, à une voie sans issue. Délaissant les rivages, tant d'un point de vue musical que thématique, d'un black metal viking d'honnête facture, Solstafir s'est alors débarrassé de sa chrysalide qui le recouvrait depuis 1994 pour décoller vers des cieux qui lui sied bien davantage, ceux d'un metal indéfinissable et très personnel à mi chemin entre un doom psychédélique et un post-rock stratosphérique. Certains (dont je fais partie) ne se sont toujours pas remis du monumental titre d'ouverture, "I Myself The Visionary Head" et ses vingt minutes répétitives et hallucinantes.

C'est pourquoi, on attendait avec une impatience pénible que le groupe offre enfin un successeur à cette pièce d'anthologie. Trois ans d'attente. C'est long. Et finalement, Köld montre enfin le bout de son nez glacé par le froid. Un visuel, frissonnant, poétique et mortuaire, écrin parfait pour une musique qui a la capacité rare de congeler sur place un caribou. Avec intelligence, les Islandais réussissent le tour de force de tracer à nouveau un sillon identique sans pour autant se répéter. Ils renouvèlent leur art et surprennent toujours, comme le démontre "78 Days In The Desert", hall d'entrée de cet édifice dont une vie entière ne suffirait pas à en faire le tour, tant il y aura toujours, une pièce, un recoin jusqu'alors inexplorés. Traçant désormais leur propre voie, ces musiciens n'ont donc pas peur de débuter avec un instrumental de près de dix minutes d'une beauté vertigineuse qui justifie à lui seul l'achat de cet album.

Solstafir prend son temps pour poser des atmosphères, les développer et emplir l'espace comme nulle autre avant lui. Ces longues pistes ont cette faculté rares de se déployer vers l'infini. l'Absolu. Mais contrairement à son compatriote Sigur Ros, dont il est parfois assez proche, le groupe reste, lui, bien ancré dans le metal, témoin, cette lourdeur qui fait plus qu'affleurer à la surface. Mais, Köld, comme son aîné direct, a cela de particulier qu'il fusionne pesanteur et légèreté évanèscante.

Irrigués par des guitares hypnotiques qui tissent une toile dont chaque fil est une larme de mélancolie, ces huit titres sont des monuments, à la fois puissants, tragiques et d'une froideur palpable. Le douloureux "She Destroys Again" ou le fébrile "Pale Rider", dont les claviers semblent provenir directement des années 70 sont ainsi deux perles émotionnelles prises dans une gange de givre. Et plus le disque progresse, plus un désespoir pétrifié s'étend tel un mal insidieux, une gangrène de tristesse. Après un "Necrologue" malsain, le déchirant "World Void Of Souls", d'où ruisselle un profond désespoir, véhiculé notamment par cette voix plus parlée que chantée, dérive lancinante et crépusculaire aux confins du doom. Plus accessible, "Love Is The devil (And I Am Ine Love)" est une sorte de chanson d'amour décalée très noire et précède le terminal "Goddess of The Ages", lente complainte désenchantée qui a la couleur de la neige sous la pluie et achève l'écoute sur une note poignante et pleine de regret. Immense.

Encore un chef-d'oeuvre à mettre à l'actif de ses Islandais dont l'origine géographique singulière explique peut-être pourquoi leur musique l'est tout autant... (cT2009)

TRACKLISTING
  1. 78 Days In The Desert 08.34
  2. Köld 08.59
  3. Pale Rider 08.05
  4. She Destroys Again 07.12
  5. Necrologue 08.30
  6. World Void Of Souls 11.51
  7. Love Is The devil (And I Am In Love) 04.43
  8. Goddess Of The Ages 12.41
TOTAL RUNNING TIME : 70.35

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